Vivre vif : parcours d’un grand brûlé

Aline Leroy

Photojournalisme

Julien Jacquemin était sapeur-pompier. En mai 2020, il est grièvement brûlé alors qu’il intervient dans un incendie. Après plusieurs mois à l’hôpital, où les médecins doivent prendre la décision de l’amputer de l’avant-bras droit, Julien reprend le cours de sa vie. Ou presque. Il joue maintenant aux équilibristes, entre quotidien rythmé par les soins et envie de se réinventer.

Quand j’ai rencontré Julien Jacquemin pour la première fois, ce ne sont pas ses cicatrices qui m’ont d’abord marquée. J’ai vu un homme plutôt grand, la trentaine, l’air confiant. Avec son manteau bleu marine, on remarquait à peine qu’il n’avait plus d’avant-bras droit.

Ancien militaire, Julien était sapeur-pompier dans la province de Liège depuis 2015. La nuit du 15 au 16 mai 2020, lors d’une intervention dans l’incendie d’une maison, le premier étage s’effondre sur lui. Son flanc droit se retrouve enseveli sous les décombres. Julien tente de garder calme et économise sa réserve d’oxygène. Ses collègues se relaient pendant près de trente minutes pour le sauver. Quelques instants de plus et il aurait suffoqué.

Pendant son hospitalisation au Centre des Brûlés du CHU de Liège, Julien reste conscient. Il sait que ses brûlures au bras droit sont profondes. Les médecins doivent se résoudre à l’amputer pour lui donner une chance de guérir. Plus d’une dizaine d’opérations et deux mois et demi plus tard, Julien est transféré au Centre de Revalidation du CHU. Il y passe un mois et demi, avant de finalement rentrer chez lui.

À sa sortie de l’hôpital, il reprend peu à peu ses marques : il passe à nouveau son permis de conduire, se remet au sport, trouve des outils adaptés à son handicap pour faciliter son quotidien…

Cela fait maintenant presque trois ans que l’accident a eu lieu. Les soins, comme la kinésithérapie ou l’ergothérapie, ont encore une place importante dans sa vie. Il doit subir plusieurs opérations chirurgicales cette année, et il avoue "en avoir marre des hôpitaux". Un ras-le-bol auquel s’ajoutent les piles de documents administratifs qu’il doit conserver soigneusement pour l’assurance.

Julien est toujours en arrêt maladie, mais il reste très proche de ses anciens collègues, qu’il considère presque comme sa famille. À terme, il pourrait reprendre un poste administratif, mais il sait qu’il n’ira plus jamais sur le terrain. "C’est difficile de se dire qu’on va partir à la retraite à trente-six ans".

Parler de son accident n’est pas un sujet tabou. Mais se reconstruire après un tel événement est un processus qui prend du temps. Julien est encore "dans une période de flottement". Au moment où j’écris ces lignes, il s’apprête à se lancer dans un nouveau défi : rouler à vélo. Une façon d’aller de l’avant.

Je remercie infiniment Julien de m’avoir ouvert les portes de son univers. Ce photoreportage est un condensé de ce que j’ai pu y découvrir. J’espère que la résilience dont Julien fait preuve vous touchera autant qu’elle m’a touchée.