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Les propositions d’Ecolo pour la mobilité : combien coûte (vraiment) le changement de mentalité ?

Publié le 07-03-2019 par Alessia Capasso et Guylaine Germain

Le 4 mars, le député fédéral Ecolo Gilles Vanden Burre a aligné les propositions sur les transports publics. Il a notamment épinglé les coupes à la SNCB et le coût des voitures de société.

 

« Nous avons deux propositions phares dans tout ce qui est mobilité. D’abord, réinvestir massivement dans le transport public. Vous savez que ce gouvernement a réduit la dotation de la SNCB de deux milliards d’euros. »

FAUX En réalité, 1,2 milliards d’euros ont été retirés de la dotation de la SNCB et d’Infrabel, soit 600 millions d’euros en moins pour la SNCB seule, nous a déclaré Mélisa Blot, porte-parole du Ministre de la Mobilité chargé de la SNCB, François Bellot. Cette coupe avait été décidée par le gouvernement en 2014, comme à chaque début de législature, en vue de la libéralisation du rail de 2023.

 

« Qu’est-ce qu’aujourd’hui coûte le système des voitures de société à l’État belge ? Les experts estiment que ça tourne autour de quatre milliards d’euros. »

PLUTÔT VRAI Selon une étude de la Commission européenne de 2017, le coût budgétaire s’élève à environ 3,75 milliards d’euros de pertes de recette par an.

 

  • Pourquoi le gouvernement a-t-il retiré 1,2 milliards de dotation ?

Selon la porte-parole du Ministre de la Mobilité, la réduction dans la dotation de la compagnie ferroviaire fut « un choix politique stratégique, difficile à assumer, mais un choix qui a eu des résultats financiers ». La SNCB avait tout intérêt à être plus performante et plus compétitive que les entreprises ferroviaires étrangères, pour garder sa mission de service public et ses avantages en 2023. Au total, la SNCB et Infrabel avaient donc reçu 13,8 milliards d’euros pour cinq ans.

Par ailleurs, en 2016, le Ministre François Bellot avait demandé un milliard d’euros supplémentaire pour des investissements ferroviaires stratégiques. Ce nouvel investissement a été validé officiellement en février 2018 et il servira essentiellement à développer le Réseau express régional (RER).

 

  • Cette économie a-t-elle été compensée ?

Pour Mélisa Blot, « l’amélioration de la productivité a permis de compenser les économies ». En effet, depuis décembre 2017, la SNCB a augmenté son offre de train de 5,1%, en zone urbaine comme en zone rurale, et notamment les soirs et les week-ends. De plus, des modernisations ont été effectuées, en particulier pour l’accueil des voyageurs (aménagement pour les personnes à mobilité réduite, wifi, parkings vélos et voitures). Des travaux d’amélioration des gares et de sécurisation des quais, entre autres, sont également en cours.

La SNCB a également constaté que le nombre de voyageurs en Belgique a augmenté de 3,5% en 2018. Selon Mme Blot, ce sont les nouvelles offres de la compagnie ferroviaire, ainsi que l’encombrement routier et les campagnes d’information pour inciter les voyageurs à changer de mentalité, qui ont permis cette hausse record.

 

Nombre voyageurs SNCB
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  • Quels types des véhicules entrent dans la notion de « voitures de société » ?

Il s’agit d’un véhicule que l’employeur met à disposition de l’employé pour ses déplacements professionnels et/ou personnels. De cette notion sont donc exclues les voitures immatriculées par les indépendants et les voitures dites « de service » ou « de flotte ». Celles-ci désignent les véhicules mis à la disposition par les employeurs pour les déplacements uniquement professionnels. Également, il faut exclure les voitures de location à court terme et celles utilisées en leasing.

Il faut savoir que le nombre des voitures de société en circulation est extrêmement difficile à calculer. Si le dossier de la Commission européenne ne précise aucun chiffre, une étude de 2015 nous donne une fourchette : il y a entre 550.000 et 670.000 voitures de société en Belgique. Elles sont surtout présentes dans les grandes aires métropolitaines du centre et du nord du pays.

 

Nombre voitures sociétés
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  • En quoi un tel système privé représente un coût pour l’État?

Une voiture de société, en tant qu’élément de rémunération, est particulièrement avantageuse pour les employeurs. En vertu de la législation belge sur l’impôt des sociétés, l’utilisation d’une voiture n’est pas soumise au système régulier des cotisations patronales de sécurité sociale, contrairement aux salaires. De plus, les frais de voiture, de déplacements liés au travail et les coûts de financement sont déductibles. Même les coûts du carburant le sont en partie (60%). La déductibilité des autres dépenses (frais d’assurance, de réparation et d’entretien) dépend de l’émission de CO2 de la voiture et du type de carburant.

En 2014, la taxe de solidarité payée par un employeur pour une voiture diesel moyenne de 150 g/km de CO2 s’élevait à 750€ sur une base annuelle. Un montant nettement inférieur à celui des cotisations versées pour d’autres types de rémunération.

En bref, la société belge encourage les déplacements sur route, mais ceux-ci ne sont pas sans conséquence : embouteillages, pollution, et même, justice fiscale. L’étude de la Commission européenne suggère un retrait graduel, sur une période de trois à quatre ans, de ce traitement fiscal favorable aux voitures des société. Cela pourrait garantir une rémunération nette supplémentaire, soit plus d’argent imposable dans les poches des salariés, et engendrer des comportements différents vis-à-vis du choix de la mobilité utilisée.

 

Crédit photo : Klaus Nahr/flickr

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