Ce site présente les productions des étudiant.es du Master en Journalisme de l'ULB
Université Libre de Bruxelles

Long Format

LGBTQI+ : Les Mille et Une Nuits bruxelloises

JWeb ULB - chargement

LGBTQI+ : Les Mille et Une Nuits bruxelloises

LGBTQI+ : Les Mille et Une Nuits bruxelloises

Publié le 09-05-2019 par
Le Parlement bruxellois hisse les couleurs des LGBTQI+

Du 2 au 19 mai est organisé le Pride Festival. Son but est de défendre les droits des personnes LGBTQI+, mais aussi de les rassembler autour d’événements festifs et culturels. À Bruxelles, c’est la RainbowHouse et l’ASBL The Belgian Pride qui organisent le festival et la Pride du 18 mai, une marche qui a lieu dans la ville chaque année depuis 24 ans.

Plusieurs événements sont organisés durant ce festival. Pour célébrer l’ouverture, la RainbowHouse était invitée au Parlement bruxellois le 7 mai à l’occasion d’une réception qui s’est terminée par le hissage du drapeau arc-en-ciel devant le bâtiment. L’un des membres du collectif a présenté le festival et son mot d’ordre cette année, #AllForOne (en français : #TousPourUn), pour mettre en avant l’importance de la solidarité et de l’intersectionnalité. Le discours a souligné les problèmes vécus par les personnes subissant plusieurs discriminations. C’est justement Rachael, femme noire bisexuelle, qui a ensuite pris la parole. Elle est coordinatrice et porte-parole néerlandophone de la Rainbow House. « La Pride est pour tout le monde. On met les personnes LGBTQI+ en avant, mais tout le monde peut participer et faire la fête avec nous. C’est pour montrer qu’on fait partie du grand public. On est là. Vous nous voyez tous les jours. », insiste-t-elle.

Rachael est la première femme noire bisexuelle à la tête de RainbowHouse © Baptiste Bodier

Le public de la Pride est différent de celui des événements qui peuvent être réservés aux personnes LGBTQI+ par la Rainbow House. Rachael explique que tout le monde ne participe d’ailleurs pas à la marche pour les mêmes raisons : « Il y a des personnes qui ont envie de faire la fête, il faut les respecter. Il y a des personnes qui ont envie de militer, il faut les respecter. Il ne faut pas non plus oublier d’où on est parti et pourquoi il y a la Pride. Il ne faut pas oublier qu’il y a des personnes qui sont mortes pour qu’on puisse faire la fête dans les rues. »

Rachael insiste donc aussi sur les revendications politiques des personnes LGBTQI+. Elle explique que la RainbowHouse regroupe plusieurs associations bruxelloises. La rejoindre permet d’utiliser ses locaux et surtout de gagner en visibilité : « La RainbowHouse représente les intérêts des associations au niveau politique. On fait du lobbying, on parle avec les élus. On est soutenus par des politiciens mais aussi par beaucoup d’associations comme les Commissions communautaires flamande, française et commune qui nous donnent des subsides », souligne Rachael. La ville de Bruxelles permet aussi à la RainbowHouse de louer un bâtiment où elle s’organise et accueille les visiteurs.

Sensibilisation, accueil et formation

Le groupement d’associations met en place des événements tout au long de l’année, pas uniquement la Pride. Il organise plusieurs festivals, lance des campagnes de sensibilisation, interpelle les politiciens et propose des formations. L’une de ces formations, « All Genders Welcome », apprend au personnel des communes à mieux accueillir les personnes trans, par exemple en évitant d’utiliser leur prénom de naissance.

Rachael salue les efforts qui ont été réalisés ces dernières années pour garantir les droits des personnes LGBTQI+, par exemple pour l’organisation de la Pride. Bruxelles est d’ailleurs réputée comme une ville accueillante pour les personnes LGBTQI+. À l’agence bruxelloise du tourisme visit.brussels, Frédérick Boutry est « consultant Gay & Lesbian Market ». Il vend la ville de Bruxelles aux communautés LGBTQI+ à l’étranger, principalement en Europe. Rachael nous explique par exemple qu’il « est en contact avec Syndigay, une petite fédération de commerçants gays à Bruxelles, qu’il met en relation avec d’autres commerçants à l’étranger. »

Mais Rachael reste sceptique. « Bruxelles est accueillante pour qui exactement ? Les personnes gays ? Queers ? Bies ? Les LGBTQI+, c’est plusieurs communautés qui sont rassemblées. Si on parle des personnes trans ou lesbiennes, j’aimerais savoir où Bruxelles se classe. C’est un peu naïf de penser que tout se passe bien pour tout le monde. On sait bien que ce n’est pas le cas. Ça se passe très mal pour les personnes trans, par exemple pour l’accès aux remboursements des soins, » souligne-t-elle.

Untitled infographic
Infogram

Le Pride Festival met donc en lumière les problèmes que rencontre la communauté LGBTQI+ en invitant le public à se rassembler autour d’événements festifs. Il propose aussi des activités culturelles pour offrir de meilleures représentations de ces minorités.

 

Pride Festival : de la rue aux planches pour éveiller les consciences

La Pride est traditionnellement le majeur événement festif de la communauté LGBTQI+. Ses couleurs sont visibles dans les rues de Bruxelles. Du quartier gay en passant par les rues à quelques pas de la Bourse, de nombreuses fresques embellissent Bruxelles cachée sous des nuages gris : Un couple d’hommes se tenant la main, des slogans illustrés, des stéréotypes détournés. Ces dessins sensibilisent la communauté mais aussi les passants au regard curieux.  En amont de la grande fête du 18 mai à laquelle tout le monde est invité, la Rainbow House et les associations qui en font partie organisent le Pride Festival. Pendant les deux semaines de ce festival, de nombreuses activités sont organisées pour mettre à l’honneur artistes et activistes LGBTQI+. On y trouve des projections de films, des ateliers, des discussions, des formations, des visites de Bruxelles mais aussi des spectacles ou des pièces de théâtre. En s’écartant de la rue du Marché au Charbon, de la Rainbow House et du quartier gay, et se rendant au théâtre des Riches-Claires du côté de la Bourse, on peut trouver une activité un peu différente. Le théâtre participe au festival en programmant une représentation exceptionnelle de Bocal, organisée en collaboration avec la Rainbow House. Dans la salle, se masse un public très hétérogène. Des plus jeunes, des plus âgés, des habitués du théâtre mais aussi des habitué du festival.

Une mère, son fils et un poisson rouge pour un point de vue différent

La pièce Bocal est sous-titrée : « Une comédie tragique, aquatique et musicale en 1 acte ». Elle raconte l’histoire de Vinciane, une mère, et Dimitri, son fils, qui passeront une soirée très particulière. Ce soir-là, Dimitri annonce à sa maman qu’il veut devenir une sirène. Il est très sérieux et apporte à sa mère toute une documentation sur les démarches à entreprendre pour commencer l’opération. Vinciane ne comprend pas. Au fur et à mesure d’une soirée complètement folle, elle fera elle aussi son coming out, délivrant à son fils tout ce qu’elle a sur le cœur.

La pièce parle d’identité, de genre, de travestissement, de rêves et de changements mais est très ouverte à l’interprétation. Elle laisse tout le monde libre d’imaginer ce qu’il veut y voir. Emilie Parmentier, une des metteuses en scène explique l’approche qu’elles ont adopté : « on a travaillé sur la transformation de soi. Comment se masquer ? Être un trans ? Comment je peux me transformer physiquement? Qu’est-ce qui me change réellement ? Si je me transforme physiquement est-ce que quelque chose change à l’intérieur ou pas ? » Carole Lambert avec qui elle a travaillé renchérit : « la mise en scène se questionne sur la multiplicité des possibilités d’exprimer qui ont est. »

Les artistes discutent avec le public après la pièce © Sophie Decaestecker

La pièce était suivie d’un bord de scène et d’une discussion très intéressante entre les metteuses en scènes, les comédiens, l’auteur, une représentante de la Rainbow House et le public. Guillaume Druez, l’auteur, s’est notamment exprimé sur la genèse de cette pièce : «  Je voulais parler du coming out d’une manière un peu décalée, de manière différente, de poétiser le coming out », a-t-il précisé. « Décalé » est bel et bien un adjectif que l’on peut associer à cette pièce. Elle traite, sur un ton tout à fait inattendu les questions de genre et de transidentité qui animent le Pride Festival dans toutes ses activités.

La découverte par le théâtre

Éric de Staercke, directeur du théâtre des Riches-Claire explique son choix de par rapport à cette pièce : « le but [de programmer cette pièce] était aussi de pouvoir permettre à un public différent d’aborder le sujet. Parce qu’à chaque fois qu’on a fait l’expérience avec des spectacles plus militants, ce ne sont que des gens qui militent pour la cause qui viennent. Et donc l’idée était justement de permettre à des spectateurs lambda qui s’intéressent au théâtre, de découvrir le questionnement via ce média-là. Il est traité d’une matière plus légère en tout cas, mais il ouvre une première porte. Et ça peut permettre à certains de s’intéresser et de découvrir le chemin de la Rainbow House ». Cet évènement est un peu en décalage par rapport aux autres activités organisées dans le cadre du Festival. Le théâtre permet de s’interroger autrement sur ces questions de genre et d’orientation sexuelle puisque le spectacle n’est pas du tout fermé à l’interprétation. Comme le dit Emilie Parmentier : «Voir l’homosexualité par le biais de devenir une sirène est le fruit d’une interprétation propre et n’est pas figée à l’intérieur du spectacle. Ce fait de devenir une sirène peut aussi symboliser le fait de quitter la maison familiale, de devenir autre chose que le fils de sa mère, le fait de prendre son envol.»

Programmer une pièce de théâtre plus traditionnelle dans le cadre du Pride Festival permet donc d’ouvrir vers l’extérieur et de faire connaître les problématiques de genres à ceux qui n’en sont pas avertis. Pour continuer ce cheminement, les spectateurs sont invités à la Rainbow House qui organisent des formations sur les questions de genres.

 

Gay Bars : #AllForOne ?

Pour continuer la soirée, quoi de mieux que de s’arrêter dans une bar pour boire un verre ou deux. Le quartier gay situé rue du Marché au Charbon, à deux pas de la Grand-Place, dispose de nombreux bars, cabarets, cafés… Même si le quartier semble petit, de nombreuses personnes déambulent d’un endroit à un autre pour profiter des ambiances uniques de chaque endroit. C’est au cœur de la capitale que se trouve une clientèle gay internationale comme le précise Thierry, propriétaire du cabaret La Boule Rouge : « Nous sommes ouverts à tout le monde, il n’y a aucune discrimination. Nous n’avons pas décidé de miser uniquement sur la communauté même si certains ne sont pas intéressés par notre concept. Pour remplir notre salle, nous avons misé sur le tourisme gay car c’est ici qu’il vient, dans le centre et plus spécifiquement dans le quartier gay ».

Soirée décontractée à la Boule Rouge © Baptiste Bodier

 

Entre deux karaokés, l’ambiance est plutôt chaleureuse. Les gens s’enlacent, s’embrassent sans se soucier des personnes présentes. C’est une qualité type des bars situés spécifiquement dans le quartier gay mais la localisation ne veut pas pour autant garantir la sécurité des tenanciers : « Les actes homophobes ont progressé depuis l’ouverture du cabaret en 2014. La police ne fait pas suffisamment son travail mais les problèmes viennent aussi du manque d’éducation de certaines personnes… » souligne Thierry.

Les bars gayfriendly

Mais le quartier gay n’est pas seul à accueillir la communauté. Grâce à une initiative de la RainbowHouse cette année, une grande partie des bars, cabarets et cafés aux alentours du centre-ville abordent un drapeau ou une guirlande LGBTQI+. Le but est de conscientiser les commerçants à la cause homosexuelle. Ainsi le lieu soutient le mouvement et est catégorisé gayfriendly. En suivant les petite étiquettes multicolores aux façades, on s’écarte de plus en plus des bars thématiques.

À 10 minutes du centre se trouve l’Ebrius Artis Bar. Ce bar gayfriendly organise le 11 mai une soirée nommée « Pile ou Face » sur le thème de la Pride : « J’ai décidé ce thème en rapport à mon mode de vie. C’est jouer avec le destin » explique Léa, barmaid et organisatrice de l’événement « On sera aussi en collaboration avec une autre association qui s’appelle ‘Go To Gynéco’ qui sensibilise les lesbiennes à s’y rendre ». Cette communauté a moins de visibilité  dans le collectif LGBTQI+ : « Il est facile pour une lesbienne de rencontrer quelqu’un dans une soirée ‘classique’ contrairement à un homme. Les hommes ont besoin de se retrouver dans un endroit à eux. Mais c’est quand même mieux d’être dans une soirée lesbienne, on se sent plus libre. J’ai déjà fait l’expérience, j’ai embrassé mon ex sur la piste de danse d’une boîte ‘classique’ et à peu près cinq mecs se sont retournés et trouvaient ça excitant. Je ne suis pas leur objet d’excitation ! Alors que dans une soirée lesbienne, il n’y pas tout ça » dit Léa, elle-même lesbienne.

Léa, barmaid à l’Ebrius Artis Bar © Baptiste Bodier

Une distinction au sein d’une communauté discriminée

Ce qui était une simple observation apparaît alors comme une évidence : le quartier gay cible majoritairement les hommes homosexuels/gays et les bars sont également gérés par des hommes. Le constat est frappant car malgré une diversité prônée par la communauté, les transgenres et lesbiennes ne sont pas représentés dans le quartier gay. Pourquoi ? Car il s’agit d’un avantage avant tout économique. C’est ce qu’explique Thierry : « Il suffit de voir la soirée ‘Démence’  qui est la plus grosse soirée gay d’Europe. Bruxelles arrive à faire 5 % de ses nuitées grâce à eux » et par eux, on comprend qu’il s’agit majoritairement d’hommes homosexuels. Dès lors, le tourisme gay préfère miser sur cette catégorie. « Celui qui fait la fête c’est l’homme gay plutôt que la lesbienne. On est dans une culture gay homme plutôt que lesbienne » ajoute aussi Léa..

Qu’en est-il des bars lesbiens ?

Il faut parcourir une grande distance pour trouver le seul bar lesbien de Bruxelles. À la rue Haute, non loin de l’avenue Louise, est caché un bar à la façade simple et vide. Il faut s’y rapprocher pour découvrir les inscriptions sur bois Mothers and Daughters  sur la porte d’entrée. Ce bar tente de se faire remarquer malgré son caractère éphémère. Mia, tenancière du bar explique ce choix: « On essaie de faire nos preuves pour convaincre que le marché lesbien est aussi important que le marché gay. Le quartier gay n’est pas axé sur la culture Queer. C’est une tendance de plus en plus présente en Europe. Les bars lesbiens ferment de plus en plus ces 15-20 dernières années. Pourquoi ? Ce n’est pas si simple… car même au sein de la communauté, il y a des jugements sexistes. »

Mia et sa copine, derrière le bar de Mothers and Daughters © Mona Bencheikh

 

La ville de Bruxelles aide le bar avec des subsides mais à court terme grâce au concept des pop-up bars. Le projet a été déposé auprès de la ville de Bruxelles qui l’analyse en fonction de son apport à la ville. Le but principal est de permettre aux propriétaires de tester le concept d’une manière limitée avant de le développer définitivement en cas de succès. C’est ainsi que l’aventure de Mothers and Daughters a commencé en décembre 2017 avec trois soirées au centre culturel Beursschouwburg avant de s’installer trois mois à la Place Sainte-Catherine. Le concept du éphémère constant devient la marque du bar mais Mia nous confie qu’elle souhaiterait un endroit définitif « Bruxelles n’a pas beaucoup de bars ‘politisés’. On ne retrouve pas de bars communistes ou féministes par exemple. Ils préfèrent se tourner vers la majorité, et les lesbiennes n’en font pas parties».

See full screen

*Carte où le jaune représente les bars gays, le vert les bars lesbiens et le rouge les lieux mixes et ouverts à tous. Carte non exhaustive des bars et lieux LGBTQI+ à Bruxelles.

Underground : loin des yeux, loin du coeur de la ville

Loin du centre-ville, le site Tours et Taxis se dresse, immense et serein, comme s’il veillait sur le canal de Molenbeek qui lui fait face. Entre l’eau et les briques se niche un hangar couvert de tags et graffitis. À la nuit tombée, cet entrepôt désaffecté à l’aspect quelque peu quelconque se transforme pour devenir l’écrin de soirées se terminant à l’heure où chacun part travailler. À la nuit tombée, ce bâtiment de prime abord vieux et branlant se métamorphose pour devenir un espace de liberté. Il faut passer par une entrée bétonnée ornée de canapés semblant avoir eu mille vies pour rentrer dans le lieu appelé le Barlok. C’est un lieu qui a été investi en 2014 par Gniak ASBL pour en faire un projet culturel, alternatif et militant : il y a du noise, des soirées expérimentales, du punk, de la psytrance, des projections de documentaires. Quatre ans plus tard, le hangar aux graffitis accueille des soirées comme celle en soutien à l’ASBL L’accroche qui compte ouvrir un centre social, culturel et politique dans la commune de Forest. À l’entrée, aucune trace d’un videur, seulement celle d’un bénévole qui tend une corbeille avec l’inscription “PRIX LIBRE”. Derrière cette corbeille, c’est toute une philosophie qui s’exprime, celle de l’accès pour tous où le geste compte plus que le montant.

Un lieu où l’on peut être soi-même

À l’intérieur du hangar, l’ambiance est plutôt clopes roulées, stretch et tatouages dans un esprit qui se veut libre et joyeux. On entend dans la salle sombre qui se trouve à gauche de l’entrée le son psytrance sur lequel les personnes se déhanchent sur le va-et-vient des basses.

Parmi eux, Zuheir.

Zuheir, à gauche, avec une amie © Baptiste Bodier

Chapeau de paille vissé sur la tête, le jeune homme au regard perçant est gay et aime se rendre dans ces soirées : « Au Barlok, ça fait un moment que j’y viens parce que je m’y sens à ma place. Il y a par exemple l’Usine ou d’autres endroits alternatifs mais à Bruxelles, les endroits où je me sens le mieux, où je me sens chez moi, ce sont ces endroits-là. Il y a cette ouverture d’esprit, des artistes, des gens de tous les univers. C’est intéressant pour moi de venir dans un endroit où tu ne te sens pas comme un extraterrestre, et tu peux être toi-même. Ce sont tous les bizarres de Bruxelles qui sont là » lâche-t-il dans un grand éclat de rire. C’est dans le milieu underground que cette culture LGBTQI+ peut sûrement s’exprimer dans toute sa diversité et sa complexité sans discrimination. Qu’ils sont loin ces sentiments parfois bizarres et dérangeants d’endroits où on ne sent pas à sa place, où l’on sent les regards inquisiteurs se poser sur soi parce qu’on semble différent.

Tu fais ce que tu veux. Tu viens en peignoir si tu veux t’habiller en peignoir. Tu viens en K-Way si tu veux t’habiller en K-Way. Tu viens en kimono si tu veux venir en kimono.
Zuheir

Être libre : le mot d’ordre

La soirée bat son plein, la vue se trouble, et les rires fusent. Après avoir passé un moment à danser sur le son, l’homme au chapeau de paille revient : « Je vais peu dans les bars gays parce qu’il y a ce côté très ghetto gay, mais je comprends aussi très bien les gens qui veulent se réfugier là-dedans. En tant que gay, ce n’est pas toujours évident de rencontrer des gens. Ce n’est pas écrit sur le front de qui que ce soit que tu es homosexuel, bi ou tout simplement hétérosexuel donc c’est aussi pour ça que les gays vont dans les lieux gays et vont moins dans les lieux alternatifs où tu as tout. C’est ça qui est chouette dans le milieu alternatif et il n’y a pas ce côté ghetto. Il y a à la fois des transsexuels, des gens qui sont bi, des gens qui s’ouvrent un petit peu à ça, des gens hétéro-curieux ou encore gays et lesbiennes. C’est cool pour les rencontres et c’est même plus intéressant de le faire ici » L’entrée dans le Barlok symbolise ce passage où les barrières tombent, où la liberté triomphe et le public qui vient ici en est témoin : ces gens-là qui se saoulent toute la nuit avec du mauvais vin ne sont pas que des LGBTQI+. Mathilde vient pour la première fois au Barlok, attirée par l’univers particulier de ces soirées où lorsque l’on pousse la porte, l’impression d’arriver dans un autre monde est immédiate.

C’est dans les lieux underground que Mathilde s’épanouit le plus © Baptiste Bodier

C’est exactement la raison qui a poussé Chris Miller, cofondateur du collectif La Garçonnière Prod., à organiser les soirées « Last Days Of ». Elles se déroulent trois à quatre fois par an dans des lieux cachés, underground ou investis comme des garages et des galeries d’art. L’idée est d’explorer les arts visuels, et la scénographie pour proposer des soirées dans un univers fort qui attire bon nombre de personnes dont des gays, lesbiennes, trans et queers sensibles à la liberté qui règne au sein de ces soirées. Derrière ces soirées underground, une idée forte est ancrée en chacun de ceux qui y participent : être libre d’être qui l’on souhaite. Au Barlok, le jour se lève, et les oiseaux de nuit partent peu à peu pour se mêler aux passants.

#sexualité #soirées techno

Ecole Universitaire de Journalisme de Bruxelles - ULB © 2024