MogaDisco : L’âge d’or de la musique somalienne

MogaDisco : L’âge d’or de la musique somalienne

Adrien Girard
Photos : Couverture : concert du Dur-Dur Band International © Liban Noah
9 août 2021

                           Édito

La musique, ce virus

En cette période de pandémie mondiale, je me permets une comparaison saugrenue. La musique serait-elle un virus qui se propage aussi vite que celui qu’on dénomme Covid-19 ? Si j’ai malheureusement transmis ce dernier à mes colocataires, je leur en ai transmis un autre, beaucoup plus sympathique : Celui de la musique somalienne des années 1970 et 1980. Un son qu’ils ne connaissaient pas hier, et qu’ils adorent aujourd’hui.

Un partage qui n’aurait pas été possible sans l’existence d’Ostinato Records. Ce label créé en 2016, par l’ancien journaliste Vik Sohonie, s’est donné pour mission de raconter les histoires méconnues du monde à travers la musique. Accompagné du DJ berlinois Nicolas Sheikholeslami, alias Çaykh, il partira à Hargeisa, la capitale du Somaliland. Là-bas, les deux amateurs de musique tomberont sur des milliers d’archives datant de cet âge d’or somalien. Parmi les chansons des grands noms de l’époque tels le Dur-Dur Band, le Waaberi Band, l’Iftin Band, Sharero Band, ils choisiront quinze titres qui figureront sur une compilation sortie en 2017. Un succès international et mon premier contact avec ce sujet.

Je me rappelle encore de la première fois que j’ai entendu de la musique somalienne. Par hasard sur internet, je suis tombé sur la chanson « Dooyo » du Dur-Dur Band. Une vrai claque ! Je suis resté scotché devant mon ordinateur. Quelques recherches plus tard, je découvre la scène musicale du pays grâce à la compilation d’Ostinato Records. Déjà fan d’afrobeat, je tombe sous le charme de ce son aux influences variées et si particulier : Les riffs des guitares, la langue somali (proche de l’arabe phonétiquement), les rythmes funk, disco, parfois reggae.

C’est cette musique si unique qui m’a donné envie d’en apprendre plus sur la Somalie et sa culture. Comme le dit si bien Vik Sohonie, « son histoire n’a pas été assez racontée dans le monde occidental ». Les réactions de mes proches quant à mon sujet de mémoire le prouvent. Pour eux, la Somalie rime avec piraterie, guerre, famine, … On ne sait finalement pas grand-chose de ce pays. On ignore qu’il était un allié de l’URSS, puis des Etats-Unis, et qu’il possédait une richesse culturelle inestimable.

Depuis trois décennies maintenant, la situation est chaotique sur le terrain. Mais ce serait malhonnête de résumer la Somalie à ce qu’elle est aujourd’hui. Il faut comprendre son histoire pour pouvoir la juger. Prenons l’exemple de la piraterie. Une très mauvaise carte postale pour le littoral somalien. Les pirates ont beau avoir une connotation négative, ils n’étaient à la base que simples pêcheurs locaux. Dans les années 2000, l’Etat n’ayant plus les moyens de contrôler le Golfe d’Aden, les navires étranger en profitaient pour violer la zone de pêche. Les locaux ont alors riposté et l’ère de la piraterie a débuté.

Pour ce dossier, j’ai dû me plonger dans une époque que je n’ai pas connue, dans un pays où je n’ai pas vécu. Je suis donc allé à la rencontre de ceux qui ont participé à cet âge d’or musical et de ceux qui y participent encore aujourd’hui. Parce que la transmission d’un virus n’a pas de frontière, c’est à mon tour d’essayer de vous contaminer de cette si belle musique. En vous la contant, ne vous inquiétez pas ! Peu de chance d’attraper une petite toux en lisant ce dossier.

La vie somalienne sous l'ère Siad Barre

Une affiche du général Siad Barre à Mogadiscio © Hiram A. Ruiz

On associe souvent la Somalie à un pays dangereux où règne la misère. Mais avant le chaos, ce territoire de la Corne de l’Afrique a connu de belles années. Sous l’autorité du général Siad Barre, la culture a occupé une place importante dans la société somali. Une génération de musiciens y faisait danser tout un peuple avec un son unique. Une époque qui s’achèvera par une guerre civile en 1991. Retour sur cet âge d’or et les raisons de sa disparition.

« La perle de l’Océan Indien » était autrefois le doux surnom de Mogadiscio. La capitale somalienne a bien changé aujourd’hui. Plus souvent citée dans les médias pour ses drames que pour sa culture, il est difficile de croire que la Somalie fut un jour, un petit coin de paradis. Pourtant, à partir des années 1970, une flopée d’artistes émergent et formeront une des scènes musicales les plus fascinantes de la planète. Une « belle époque » qui est née avec les changements politiques du pays.

Les 18 régions somaliennes © Wikimedia Commons

Avant de proclamer son indépendance, ce territoire de l’Afrique de l’Est était divisé en plusieurs régions bien distinctes, dont l’ex-colonie italienne et le protectorat britannique du Somaliland. En 1960, ces deux provinces fusionnent pour créer la République autonome de Somalie. Cette union fut un échec politique. Et pour cause, la Corne de l’Afrique est ethnologiquement composée de nombreux clans et tribus.

 

L’unification par le socialisme

Le 15 octobre 1969, le président Abdirashid Ali Shermarke est assassiné. Quelques jours plus tard, le général de l’armée somalienne Mohamed Siad Barre mène un coup d’Etat et s’empare du pouvoir. Il instaure la Deuxième République et prône alors un « socialisme scientifique » en se rapprochant de l’URSS. « C’est le début des belles années, nous confie Yusuf, un ancien habitant de Mogadiscio. L’éducation, la santé s’améliorent considérablement et deviennent gratuits ». Plus surprenant encore, Siad Barre va même décréter l’égalité des sexes devant la loi. Une première chez les Somalis (nom désignant une partie des habitants de la Corne de l’Afrique) qui penchent plutôt vers une société islamique conservatrice.

Dans les années 1970, des Somalis de tribus diverses migrent vers les villes et principalement à Mogadiscio. Le Théâtre National, les hôtels, les cafés sont bondés. La culture est fortement soutenue par le gouvernement militaire qui décide de nationaliser l’industrie musicale. Des orchestres comme le Waaberi Band ou des groupes tel l’Iftin Band voient le jour. Sur une musique traditionnelle aux accents funk, rock, reggae, des voix comme Maryam Mursal (du Waaberi Band) chantent les louanges du général Siad Barre.

L’ouverture avec l’Occident

La région de l’Ogaden © Wikimedia Commons

En 1977, le président somalien veut récupérer de force la région de l’Ogaden en Ethiopie. Une déclaration de guerre qui met fin à l’alliance avec l’Union soviétique, les communistes étant un soutien du gouvernement éthiopien. Fin négociateur, le général Siad Barre pactise avec les Etats-Unis. Malgré une propagande forte pour encourager les troupes, notamment via la musique, l’armée somalienne perd la guerre face à son voisin.

Le rapprochement avec l’Ouest offre tout de même aux Somaliens un accès à la culture occidentale. « Pour la première fois à la radio, on entendait autre chose que la musique locale, raconte Yusuf. Je pense que la Motown, le funk, le disco, ont largement inspiré les artistes somaliens dans les années 80. » Alors que la cote de popularité du chef de l’Etat baisse considérablement depuis le fiasco de l’Ogaden, la scène musicale commence à s’émanciper. Les textes se veulent moins patriotes et des groupes indépendants font leur apparition, dont les très populaires Dur-Dur Band et Sharero Band.

 

 

 

Les années 80 marquent aussi le début de l’exportation musicale somalienne vers la scène internationale. Ainsi, le groupe Waaberi (affilié au Théâtre National de Mogadiscio) partira faire une tournée en passant par Russie, la Chine, le Moyen-Orient et l’Europe de l’Est. Si le pays s’ouvre au monde, la politique autoritaire de Mohamed Siad Barre commence à se transformer en véritable dictature. Les tensions claniques refont surface et l’Etat répond par la répression. L’opposition et les mouvances rebelles au régime grandissent au cours de cette décennie.

La fin de la « belle époque »

Maryam Mursal, la chanteuse star du groupe Waaberi, écrit la chanson « Ulimada (The Professors) » qui est en réalité une attaque à peine déguisée contre la dictature. Bien qu’elle soit l’une des artistes les plus populaires de la Somalie, elle sera interdite de représentation dans tous le pays, à la suite de cette controverse. Sur le site de son label Real World Records, elle explique même avoir dû se reconvertir en conductrice de taxi afin pouvoir survivre. La société se retrouve complètement déstructurée et délaissée par le pouvoir en place.

La fin de ces années annoncent les prémices de la guerre civile. En 1988 le Général Siad Barre décide de violer l’accord de paix avec l’Ethiopie . L’armée bombarde la région de l’Ogaden où les groupes hostiles au régime sont très présents. L’heure n’est plus à la fête et la musique se fait plus rare. Face à l’insurrection des rebelles de l’United Somali Congress (USC), le président prend la fuite le 27 janvier 1991. L’ère Siad Barre se termine et laisse place au chaos. Les rebelles prennent alors le pouvoir dans un climat de guerre civile. Les différents clans s’affrontent dans des combats armés. Le Somaliland situé au nord du pays proclame son indépendance et restera en retrait des conflits jusqu’à aujourd’hui.

C’est le début de l’exode pour des milliers de Somaliens, contraints de quitter leurs terres pour se réfugier. Les pays limitrophes sont privilégiés comme l’Ethiopie, le Kenya le Somaliland, Djibouti. Les artistes prennent eux aussi la fuite, la musique s’arrête brusquement. Les années qui suivirent furent tout aussi dramatiques. L’ONU interviendra sans résultat face à un peuple totalement divisé. « Du temps où Siad Barre était président, la Somalie semblait être unie, mais ce n’était qu’une illusion, conclut Yusuf. En réalité, ll l’a divisée encore plus en intervenant militairement à Hargeisa ou dans l’Ogaden. La vraie unité venait de la musique. C’est grâce à elle que nous étions heureux d’être ensemble. Quand les gens de diverses tribus se réunissaient dans les villes pour danser au son des musiciens somaliens. »

« Je suis né à Mogadiscio »

Le Théâtre National (Mogadiscio) © Mariam Omar

Osman et Ayana ont tous les deux vécus à Mogadiscio. Ils ne se connaissent pas, mais ils ont en commun d’avoir connu la musique somalienne sous l’ère Siad Barre. Si l’un a fui le pays après la guerre civile de 1991, l’autre y vit toujours aujourd’hui. Ils gardent dans leurs souvenirs, l’image d’une ville festive et riche en cultures. Les divers conflits ont effacé beaucoup de traces de cette « belle époque », mais pas leurs témoignages.

« Vivre à Mogadiscio c’était le paradis ! », Osman Aden Khalif ne mâche pas ses mots. Sous le régime militaire du général Siad Barre (1969-1991), il a vécu quelques-unes de ses plus belles années en Somalie. Les terrasses de café étaient remplies, les fêtards se retrouvaient dans les théâtres et les hôtels, les chansons du Dur Dur Band envahissaient les ondes. En se remémorant ces doux souvenirs, Osman ne peut s’empêcher de sourire. Désormais installé en Belgique, il a accepté de nous raconter sa version de Mogadiscio. Ne parlant pas français, il a demandé à son neveu Ilyas Ibrahim de s’improviser traducteur le temps de l’interview. Ce dernier nous a donné rendez-vous avec son oncle à Molenbeek-Saint-Jean, au sein de l’ASBL Horizon Sud dont il est le président.

Bonjour Osman ! Pouvez-vous vous présenter s’il vous plaît ?

Je m’appelle Osman Aden Khalif, je suis né à Mogadiscio le 1er octobre 1958. J’ai beaucoup bougé dans ma vie. J’ai vécu en Somalie, en Corée du Sud, en Italie, en Belgique…

Quel souvenir gardez-vous de Mogadiscio avant la guerre civile de 1991 ?

C’était vraiment bien ! Une superbe ville. Mon enfance était radieuse, c’était une autre époque, une autre génération. Mon père était commerçant et ma mère était au foyer comme beaucoup de mères somaliennes. Je me rappelle d’une belle jeunesse. Que ce soit au niveau de l’éducation, la santé, tout était très encadré à l’époque. Aujourd’hui, tout a changé avec la guerre civile. Nous vivions vraiment bien, surtout au début de l’ère Mohamed Siad Barre.

La musique avait-elle une place importante à cette époque ?

Complètement ! Je n’étais pas le plus grand fan de musique, mais comme tous les habitants de Mogadiscio, on en entendait tout le temps. J’avais la vingtaine quand la scène musicale a vraiment émergé là-bas. Dans les années 1970, la Somalie était un grand pays à l’échelle continentale. La musique somalienne était très connue et très appréciée dans l’Afrique de l’Est. Il y avait des compétitions musicales entre les pays voisins, c’était du sérieux. C’était généralement le Soudan et le Somalie qui se retrouvaient en finale. Il y avait de grands chanteurs qui menaient la compétition. Je me souviens de Mohamed Suleiman Tubeec, par exemple.

Y avait-il beaucoup de concerts dans la capitale ?

Oui, mais pas seulement à Mogadiscio. La Somalie est composée de dix-huit régions, il y avait des groupes d’artistes connus à l’échelle nationale. Ils partaient à travers tout le pays pour jouer. Le point de départ de ces tournées était généralement au nord du pays, dans une ville portuaire qui s’appelle Berbera.

Le Dur-Dur Band, cela vous parle ?

Ah oui ! Mais ça se prononce « Dour-Dour » (rires). Ils passaient tout le temps à la radio. Cela fait longtemps que je n’ai pas écouté ça !

Vous voulez en écouter ?

Ce serait super ! Allez-y !

(Nous mettons la chanson « Fagfagley »)

Nous n’avons qu’une seule langue officielle qui est le Somali, mais il y a plein de dialectes en Somalie. Un nordiste avait souvent du mal à comprendre un sudiste. Et le Dur-Dur Band avait plutôt tendance à chanter en langue sudiste.

Mais vous comprenez les paroles ?

Oui, parfaitement (rires). C’est une chanson d’amour, et l’homme qui chante est en train de vanter sa bien-aimée en la qualifiant de perle rare. Il la décrit comme une femme très dynamique, et à l’époque, l’émancipation des femmes était peu peu commune. Dans la chanson, le chanteur raconte qu’elle serait même capable de conduire une voiture, tellement elle est parfaite.

Ah oui ça fait un peu vieux jeu dit comme ça ! Les femmes avaient-elles leur place dans la musique ?

Absolument ! Il y avait la chanteuse Magool, par exemple. On l’appelait « la voix douce ». Elle avait la plus belle voix de tous les artistes de l’époque. Il y avait aussi Maryam Mursal qui chantait avec l’orchestre national Waaberi. Quelques chanteuses étaient réputées à l’international. Maryam Mursal en faisait partie. Elle était sous contrat avec le label de Peter Gabriel, Real World Records.

Et fin 80, Mogadiscio c’était toujours le paradis ?

Non non non ! Le niveau de vie avait baissé de manière considérable à la fin de la décennie. La « belle époque » était finie.

Vous avez vécu la guerre civile de 1991 ?

Oui, mais je n’ai pas pris le fusil, heureusement. Je ne faisais pas partie des membres rebelles non plus. Il y avait des exodes dans tous les sens. Certains se sont orientés vers la mer. Les gens quittaient la capitale pour la province. Tout le monde allait dans sa tribu. J’ai d’abord quitté Mogadiscio pour le nord quand le régime de Mohamed Siad Barre est tombé en janvier 1991. Puis, j’ai quitté le nord parce que ça chauffait trop, et je suis allé au sud. On partait comme on pouvait, parfois à pied. J’ai définitivement quitté le pays en 1998.

Selon vous, la guerre civile a-t-elle effacé le patrimoine culturel somalien ?

Non ! Certes, La guerre a déstructuré le pays, mais la danse, la musique et tout le patrimoine culturel perdure. Les Somaliens sont toujours très proches de leurs traditions, leur musique. C’est effectivement moins encadré, mais vous allez découvrir que rien n’a disparu en cherchant bien.

Que pensez-vous de l’état actuel du pays ?

La Somalie était considérée comme étant le paradis sur terre des pays africains des années 1960 aux années 1980. C’est le pays d’Afrique qui a la plus grande côte maritime. Il y a deux fleuves, le pétrole, le gaz naturel, du bétail, … La Somalie était un pays riche. Aujourd’hui, la réputation de la Somalie est négative, mais il faut nuancer certaines choses. Dans les médias, on nous parle que des pirates et des terroristes. En fait, pas mal de pays, surtout les pays limitrophes, ont profité du chaos somalien après la chute de Mohammed Siad Barre. Chaque pays a, à sa manière essayé de voler les ressources du pays. Quand vous voyez des bateaux de pêche industrielle se ramener sur vos côtes et vider le fond marin, c’est normal de riposter. Et la riposte ça a été la piraterie. La culture et les bonnes choses qui émanent de la Somalie ne sont pas visibles au niveau international. C’est vraiment dommage !

Qu’est-ce que vous ressentez quand vous apprenez que des amateurs de musique s’intéressent à celle de la Somalie ?

Je suis agréablement surpris pour tout vous dire. Je pensais pas qu’un Européen viendrait un jour m’interviewer sur le sujet. C’est génial de montrer une face un peu oubliée d’un pays. Tout à l’heure, j’étais étonné quand vous êtes rentré dans la pièce parce que je pensais que vous seriez africain (rires). Je suis encore plus content qu’une personne étrangère à nos coutumes s’intéresse à la musique somalienne. Merci beaucoup !

 

 

 

Exit la Belgique, direction Mogadiscio maintenant. Ayana Abdi vit encore dans la capitale somalienne. Elle y est née en 1975, mais contrairement Osman Aden Khalif, elle est toujours restée dans la région de la Corne de l’Afrique. Travaillant pour des ONG en tant que médecin, elle espère qu’un jour Mogadiscio pourra redevenir « la perle de l’Océan Indien ».

Nous l’avons contactée via son fils, qui lui, habite près de Liège, en Belgique. À l’instar de la précédente interview, ce dernier a accepté de s’inventer traducteur le temps d’un appel vidéo.

 

Ayana Abdi (à droite) et son fils © Abdinasir Hussein Dahir

 

Bonjour Ayana ! Comment ça va à Mogadiscio ?

Pour l’instant ça va, même si c’est compliqué de temps en temps. Un jour, tout peut très bien aller. Le lendemain il peut y avoir une bombe qui explose, un attentat, un enlèvement, …

Aujourd’hui par exemple, tout va bien !

Que faîtes-vous à Mogadiscio ?

Je travaille comme médecin dans une clinique et à domicile. Je suis également en contact avec des ONG sur place afin d’améliorer la situation sanitaire.

Cela fait combien de temps que vous vivez ici ?

Depuis que j’y suis née (rires), c’est à dire en 1975. J’ai fait mes études de médecine à Mogadiscio, j’ai toujours voulu y rester.

La ville a dû changer considérablement ?

Pendant le début de l’ère Siad Barré, c’était paisible ! On sortait beaucoup. On allait au théâtre, au cinéma, dans les stades de foot.

Les concerts aussi ?

Oui, bien sûr ! J’étais une habituée du Théâtre National. C’est là que la plupart des grands artistes se produisaient. Je me souviens qu’il y a eu le Dur-Dur Band, Waaberi, Magool, notamment. Je suis nostalgique de ces années-là. À partir de 1991, tout est parti en fumée. Il y a des bombardements et le Théâtre National a d’ailleurs été détruit.

Malgré la guerre, tu es quand même restée ?

Oui ! Mon père a emmené mes frères et sœurs se réfugier en Europe. Avec ma mère, on a décidé de rester à Mogadiscio. On avait des amis à Djibouti et au Somaliland. Dès que ça chauffait trop ici, on s’exilait chez eux un petit temps.

Pour revenir à la musique, les Somaliens écoutent encore aujourd’hui des groupes de l’époque ?

Absolument ! Même si la plupart des ces artistes ne sont plus de ce monde aujourd’hui, ils sont toujours très écoutés. Sur Youtube, on retrouve pas mal de sons. C’est la fierté nationale d’avoir eu des musiciens comme eux.

Y a-t-il encore une scène musicale à Mogadiscio ?

La culture musicale ne s’est pas effacée malgré les conflits. Il y a des nouveaux artistes qui sont en train d’émerger en ce moment. Un peu partout dans la ville, des concerts s’organisent discrètement, à l’abri des regards. Dans des caves ou des lieux tenus secrets. Il faut faire très attention avec cela. Depuis des années, les évènements musicaux sont malheureusement interdits.

On est loin de la « belle époque » en effet !

La mentalité a complètement changé depuis ! Avant, tu pouvais aller à la plage en maillot, maintenant, tout le monde te regarde de travers si tu montres un peu de ta peau.

Ton fils arrive à venir te voir de temps en temps ?

On a une tradition chez nous les Somalis, c’est que les enfants doivent de temps en temps revenir au pays. C’est ce qu’on pourrait appeler le retour au bled pour les enfants partis vivre à l’étranger (rires). C’est surtout pour leur faire comprendre qu’ils ont de la chance. Je vous assure que ça marche à chaque fois.

(Son fils approuve) : « Je suis revenu en 2006, c’était un choc. La liberté, c’est quelque chose qui leur est étranger maintenant ».

Ostinato Records, le label qui a remis la lumière sur Mogadiscio

© Ostinato Records

Raconter les histoires par la musique, c’est l’objectif que s’est fixé Vik Sohonie en créant Ostinato Records. L’ancien journaliste est parti à la recherche des trésors musicaux oubliés de ce monde. Parmi eux, la Somalie. Un son singulier qui fit la richesse de la Corne de l’Afrique dans les années 1970 et 1980. Récit d’un label hors du commun, conté par son fondateur. 

Vik Sohonie © Grammy Awards

L’histoire commence bien loin de la Corne de l’Afrique, … À New-York précisément. Né en Inde, Vik Sohonie a pas mal voyagé avant de s’installer aux Etats-Unis. Dans les années 2010, cet amoureux de la musique est journaliste pour l’agence de presse Reuters, mais sa profession ne lui convient plus. Il trouve que quelque chose cloche. La façon dont les médias  occidentaux traitent l’information ne lui plaît pas, surtout la couverture des continents africain et asiatique. « Dès que j’entendais parler d’une de ces régions du monde dans les journaux, c’était toujours en négatif », explique l’ancien reporter, désormais installé en Thaïlande.  

Lassé de succomber à cette vision biaisée du monde extérieur, Vik imagine une nouvelle façon de le raconter. « Je me suis dis qu’il fallait mettre en avant les richesses des pays qui ont une mauvaise image ici, poursuit-il. Finalement, rien ne parle plus que la musique. Alors je me suis mis en tête de lancer mon propre label. Avec un but : celui de raconter des histoires par la musique. »

Disc-jockey et digger (expression désignant les collectionneurs de vinyles) à ses heures perdues, Vik dispose d’une belle liste de contacts dans les maisons de disque. Un pied dans la musique, l’autre dans le journalisme. Le mélange parfait pour créer Ostinato Records en 2016. Le principe ? Aller dans un pays méconnu pour sa richesse culturelle, et en ressortir une compilation.

La pochette de la compilation sur Haïti © Ostinato Records

La première mixtape du label sera ainsi consacrée à l’île d’Haïti. « Je ne supportais pas la couverture médiatique de certains pays et Haïti est un bon exemple. Tout le monde pense qu’il y a une pauvreté extrême, que c’est dangereux, etc… Pour y être allé, je peux vous affirmer que c’est « safe », les gens sont adorables et la nourriture est incroyable. Ce qu’on voulait faire en sortant ce disque, c’était d’humaniser Haïti et de dire aux gens d’aller visiter ce pays ! »

« Tous les chemins mènent à Mogadiscio »

En 2017, c’est au tour du Cap-Vert et de la Somalie d’avoir droit à leur compilation. L’Afrique de l’Est était un passage obligé pour le boss du label. « L’histoire de l’Afrique de l’Est n’a pas été beaucoup contée dans le monde, explique t-il. On a tendance à oublier que c’était un centre important du commerce international. Située à la pointe de l’Afrique de la Corne, la Somalie disposait d’un avantage géographique certain. La proximité avec le Moyen-Orient et les interactions avec l’Inde ont beaucoup influencé la culture de ce pays. Cela se ressent jusqu’à la musique. On dit que tous les chemins mènent à Rome, moi je dirais plutôt qu’ils mènent tous à Mogadiscio ».

Seul problème de ce voyage pour Vik, les archives avaient disparu. En effet, le pays est tombé dans l’instabilité constante depuis la guerre civile de 1991 et la chute du régime du Général Mohammed Siad Barre. Heureusement, une rumeur court : Alors que les bombardements commençaient à détruire les villes, les employés d’une radio locale ont eu la brillante idée de mettre à l’abri les cassettes et autres bandes sonores. Vik qui a eu vent de cette légende se lance dans la quête de ce trésor, accompagné de son associé d’Ostinato Records, Nicolas Sheikholeslami, alias Çaykh, DJ basé à Berlin.

Çaykh · Au Revoir, Mogadishu (A)

C’est finalement à Hargeisa, la capitale du Somaliland, qu’ils mettront la main sur 10 000 enregistrements déterrés et collectés dans le centre culturel de la ville. Une mine d’or pour les deux diggers. Après un long travail de numérisation de ces archives, les deux compères ont sélectionné quinze titres qu’ils réuniront dans leur compilation Sweet As Broken Dates: Lost Somali Tapes from the Horn of Africa.

Pour le grand public, la surprise est totale. Il découvre un son afrobeat unique aux influences diverses : la musique indienne, le reggae, la funk… « Beaucoup de personnes ont une vision négative de la Somalie à cause de nos médias. Aujourd’hui, ils apprennent à mieux connaître sa richesse à travers la musique. Je suis content car c’était le but recherché en créant Ostinato Records. » Les médias du monde entier, et même occidentaux ne tarissent pas d’éloge sur ce projet. « Ce disque est donc un miracle. Un legs du passé qui estompe le trauma du présent et promet de magnifiques gerbes pour demain », pour Le Monde. « Peut-être la plus belle musique du monde, enfin redécouverte » selon Radio Nova. The Guardian a quant à lui décerné la note maximale de cinq étoiles à l’œuvre produite par Ostinato Records.

Un succès qui invitera même notre ami Vik Sohonie à défiler sur le tapis rouge lors des Grammy Awards 2017. Sweet As Broken Dates : Lost Somali Tapes from the Horn of Africa y est nominé dans la catégorie « meilleur album historique ». Même si elle n’obtiendra pas la récompense suprême à l’issue de la cérémonie américaine, cette compilation aura eu le privilège de ressusciter la musique du Dur Dur Band, de Waaberi Band, de l’Iftin Band, …

Après son heure de gloire, Ostinato Records ne se repose pas sur ses lauriers pour autant. Le travail de fouille continue, au Soudan, puis au Sénégal, … Les compilations à succès s’enchainent et Vik veut élargir le champ des possibles pour sa maison de disque en signant des artistes contemporains. « Nous voulons trouver des artistes qui ont un pied dans le passé et l’autre dans le présent. Des gens qui respectent leurs aînés. Si vous voulez, c’est un peu comme un livre : vous devez lire le chapitre un pour comprendre le suivant. Là, on est en train d’écrire le chapitre deux. »

« Nous sommes un média, en plus d’être un label musical »

« Le premier groupe qui a signé sur le label Ostinato est le groupe RTD originaire de Djibouti. C’est une musique moderne qui sonne un peu comme la musique somalienne des années 1970-1980. » Peu connue dans le monde, la musique de Djiboutienne est complètement sous le contrôle de l’Etat. D’où la nécessité pour Ostinato Records de la faire découvrir.

Aujourd’hui, la tâche s’annonce de plus en plus compliquée pour le label avec l’apparition de la crise du Covid-19. En cette période de pandémie mondiale, seulement 2% des Africains sont entièrement vaccinés contre plus de 50% en Belgique. Un processus à deux vitesses qui inquiète le boss du label : « les artistes africains n’ont pas accès au vaccin. Et sans le passeport vaccinal, ils ne peuvent pas voyager et donc faire des tournées. J’aimerais que l’industrie musical en Europe et aux Etats-Unis se bouge pour les aider. Beaucoup de ces gens sont des salariés de cette industrie. »

Grâce à leur travail d’exploration, Ostinato Records a pu nous offrir de très belles histoires dont celle de l’âge d’or de la musique somalienne. « Nous ne sommes pas seulement un label musical, résume Vik. Nous sommes aussi et surtout un média ».

Liban Noah, l’homme qui a recréé le Dur-Dur Band

Liban Noah (deuxième à droite) et le Dur-Dur Band International © Liban Noah

Dans les années 80, la Somalie héberge une des scènes musicales les plus riches d’Afrique avec pour têtes de gondole, les musiciens du Dur-Dur Band. Après la guerre civile, les artistes de cette génération disparaissent et tombent peu à peu dans l’oubli. Dans les années 2000, Liban Noah s’est lancé dans un projet fou : celui de reformer le groupe star. Portrait de l’homme qui veut à nouveau faire briller la culture somali.

« Il y a deux histoires dans le Dur-Dur band : celle qui est née en Somalie avant la guerre, et celle que j’ai créé ici en Angleterre ». Un peu vantard, c’est ainsi que Liban Noah nous résume l’histoire du groupe qui fit danser la Somalie dans les années 80. Installé à Londres, il est désormais le manager de la nouvelle version du groupe réunissant plusieurs anciens membres de l’époque, le Dur-Dur Band International. 

Né en 1973 à Mogadiscio, Liban a toujours adoré la musique. Sa mère était d’ailleurs une chanteuse très populaire dans la Corne de l’Afrique, notamment à Djibouti. Après sa mort en 1979, c’est son père qui l’élève et l’éloignera alors de ses envies d’artiste. « Petit, je voulais faire de la batterie pour pouvoir accompagner ma mère sur scène, raconte t-il. Malheureusement, mon père n’était pas de cet avis. Il était ingénieur et bossais pour des grosses entreprises internationales comme BP. Il voulait que je fasse de grandes études, que je suive sa voie ».

En 1984, lorsque le Dur-Dur Band se forme, Liban est un jeune garçon de 10 ans. Il ignore qu’il deviendra un jour leur manager, mais assiste sur place à la naissance du groupe phare. « La plupart des groupes de l’époque étaient encore sous contrat avec le gouvernement, souligne Liban. Par exemple, l’Iftin Band était totalement subventionné par le ministère de l’Education. Le Dur-Dur eux, c’était un collectif indépendant composés notamment de musiciens d’autres groupes appartenant à l’Etat. Au début, ils jouaient seulement les mardis dans les hôtels. C’était plein à chaque fois. Puis, ils ont commencé à jouer les mercredis puis le week-end. Très vite, ils sont devenus incontournables. »

Alors que la situation de la Somalie se dégrade vers la fin de la décennie, Liban et sa famille quittent le pays pour l’Europe. « On s’est éparpillé un peu partout. Mon père vivait au Danemark, moi en Suède, ma sœur en Allemagne, explique Liban. C’était une période terrible pour les Somaliens. Dieu merci, nous sommes partis avant la guerre civile. C’est à partir de la fin de l’ère Siad Barre que nous avons tout perdu : nos terres, notre culture, notre art. »

La musique somalienne disparaît pour laisser place au chaos. En 1992, certains membres du Dur-Dur vont se réfugier en Ethiopie et même y enregistrer un album (Africa). Ce sera le dernier du groupe avant leur séparation. Ils mèneront leur vie chacun de leur côté, en Europe ou ailleurs.

En 2002, Liban reçoit une vidéo de sa tante qui vit à Hargeisa, au Somaliland. C’est alors le déclic pour le futur manager : « Sur la video, on voyait le Théâtre de ville totalement détruit. C’était un célèbre bâtiment construit par un architecte somalien et financé par le peuple. Quand j’ai vu ce symbole de notre culture en ruine, j’ai décidé d’intervenir. »

« Je voulais recréer un groupe comme à l’époque, mais à Londres »

Habitant à Londres, il commence à récolter des fonds pour reconstruire le théâtre avec le soutient du gouvernement somalilandais. Il intègre alors l’organisation de la communauté somali très présente au Royaume-Uni. Soutenus notamment par la BBC, Liban et ses compères participent à des conférences publiques afin de promouvoir leur communauté. C’est grâce à ces événements qu’il rencontre des artistes somaliens. Ayant un grand sens de l’organisation, Liban commence à prendre du gallon au sein de la communauté somali : « Un jour, un ami qui bosse pour un festival en Norvège m’appelle. Il me dit : « j’aimerais avoir de la musique somalienne pour la programmation ». Plutôt que de ramener un disque pré-enregistré, il contacte des musiciens somaliens qui joueront lors de ce festival. »

Ce qui lui donne l’idée de « recréer un groupe comme à l’époque, mais à Londres, explique Liban. Dans les années 2000, les seuls artistes qui arrivaient à gagner leur croûte, c’était les clavieristes. Avec la technologie, ils n’avaient pas besoin de former un groupe. La musique somalienne c’est une musique vivante, les artistes de cette époque sont des musiciens. Je voulais montrer ça au monde, et qu’on arrête de résumer la Somalie à la guerre, la piraterie, le terrorisme. »

En 2009, Liban organise une réunion dans la capitale anglaise avec cinq musiciens de l’époque : « il y avait quatre membres du Dur-Dur et un de l’Iftin. Je leur ai proposé de former un groupe et ils n’ont pas mis longtemps à accepter. » C’est ainsi que renaît le plus grand nom de la scène musicale somalienne sous le pseudonyme de Dur-Dur Band International. « Pour le nom, c’est la majorité qui l’a emporté », rigole Liban.

« Le but, c’est de transmettre notre culture à la nouvelle génération »

Les jours suivant, les répétitions commencent. Le manager du groupe achète tout le matériel et loue une salle de studio. « La plupart des gars n’étaient pas riches et il a fallu que je mette la main à la patte pour les aider. Par exemple, je payais Saïd Hussein le batteur, pour qu’il donne des cours à des jeunes enfants de la communauté. Le but, c’est vraiment de transmettre notre culture à la nouvelle génération. »

La première représentation public du Dur-Dur Band International a lieu lors de la fête de l’indépendance de la Somalie, le 1er Juillet 2011 dans une petite salle de l’East London. « Au début, on ne jouait que dans des petites salles et très peu souvent. C’est vraiment à partir du milieu des années 2010 qu’on commence à se faire connaître ».

Grâce au travail d’archives du label Ostinato Records et du centre culturel d’Hargeisa, la musique somalienne des années 70-80 refait surface. Le grand public découvre alors les sons funk, disco, reggae du Dur-Dur Band, de l’Iftin Band, du Sharero Band, … L’occasion rêvée pour Liban et sa troupe de surfer sur la vague. Ils rencontrent Vik Sohonie, le fondateur d’Ostinato Records, qui leur proposera même de signer un album sous sa maison de disque. Liban est alors comblé : « Je suis tellement reconnaissant envers ces amateurs de musiques qui s’intéressent à notre culture. Grâce à eux, le monde a découvert la beauté de notre musique. » Analog Africa, un autre label occidental, réédite ainsi les deux premiers albums du Dur-Dur. « Les membres du groupes ont été tellement surpris. Ils ne pensaient pas après tout ce qu’il s’est passé pour la Somalie que leur musique survivrait encore aujourd’hui », nous révèle leur manager.

Mohamed Kamara, un des membres fondateurs du Dur-Dur © Liban Noah

Les programmateurs de concert font désormais sonner le téléphone portable de Liban toutes les semaines. Les journalistes aussi. « Depuis cinq six ans, on est très occupé, assure t-il. On a fait des shows en France, en Allemagne, au Portugal, au Pays-Bas et en Belgique. » Aucun album publié sous leur nouveau nom, les membres du Dur-Dur offrent leur musique en live et remplissent les salles. Ils sont médiatisés dans tous les pays où ils passent, mais ironie du sort, ils sont presque inconnus en Somalie. « La mentalité a énormément changé là-bas, regrette Liban. La religion a pris beaucoup de place et la musique se fait rare. »

 

« Nous préparons une tournée en Afrique de l’Est passant par Mogadiscio »

Lorsqu’on lui demande si le groupe pourrait se produire à Mogadiscio un jour, Liban sourit : « je suis content que vous me posez cette question. C’est évidemment un objectif que je me suis fixé. Depuis trois ans, nous préparons une tournée en Afrique de l’Est. Elle commencera par Djibouti, puis l’Ethiopie, Hargeisa au Somaliland, Mogadisicio et enfin Nairobi au Kenya. On a déjà plusieurs médias qui veulent couvrir l’événement. » Un retour aux sources mis au point mort à cause la pandémie mondiale du Covid-19.

A l’instar du label Ostinato Records, Liban Noah a grandement contribué à la reconnaissance internationale de la musique somalienne. Montrer que ce peuple meurtri par la guerre civile peut encore briller par sa culture et la perdurer, c’était l’un de ses souhaits les plus chers. « Je veux créer une nouvelle génération pour le peuple somali, nous confie t-il. Que les jeunes s’instruisent de leurs aînés pour développer leur propre style. La façon dont les artistes jouaient ne doit pas être oublié, cela fait partie notre patrimoine. Avec le Dur-Dur Band International, on essaye de ramener ce qu’on a perdu et de créer un nouvel épisode excitant pour les Somaliens. »

De droite à gauche : Omar Tesiyow, ingénieur de la BBC, Abdillahi, Ugery, Saleh Hariri, Liban Noah, Akila, Zakaria, ingénieur de la BBC, Fadumina, Mohamed Karama, Nabil, Said Hussein. © Liban Noah

 

K’naan : la seule star somalienne depuis le Dur-Dur Band

K’naan lors de la cérémonie d’ouverture de la Coupe du Monde 2010 à Soweto (Afrique du Sud) © William Haun

On se souvient tous du tube « Wavin’ Flag »  de K’naan avec ses « oh, oh, oh, oh oh». C’etait 11 juin 2010 à Johannesburg. La première Coupe du Monde de football sur un sol africain était lancée. L’évènement parfait pour le sponsor Coca-Cola de choisir un artiste du continent pour faire sa publicité. L’heureux élu n’est autre que le chanteur somalien K’naan. Keinan Abdi Warsame de son vrai nom, devient alors un star internationale. Une première pour le pays depuis 1991. Encore aujourd’hui, c’est l’un des seuls somaliens à être connu dans le monde entier.

Keinan Abdi Warsame est né en 1978 à Mogadiscio. Sa tante n’est autre que la célèbre chanteuse Magool, nom incontournable de la scène musicale somalienne. Une fibre artistique qu’il saura mettre à profit plus tard. Lorsque la guerre éclate, il fuit le pays avec sa famille pour les Etats-Unis, puis le Canada. K’naan lance sa carrière d’artiste au début des années 2000. Fortement influencé par la musique traditionnelle africaine, il jongle entre le Hip-Hop, la pop et le Reggae. Jusqu’à atteindre son apogée avec « Wavin’ Flag » en 2010.

A sa façon, il a aussi contribué à redorer l’image de la Somalie. Dans les médias notamment, il a notamment pris la défense des pirates somaliens dans les médias, expliquant qu’ils protégeaient avant tout leur côte de la pêche illégale.

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La « MogaDisco », c’est par là.

Pour tout écouter d’Ostinato Records, c’est juste ici.