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Les soignantes, trois ans après les applaudissements

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Les soignantes, trois ans après les applaudissements

Les soignantes, trois ans après les applaudissements

Publié le 30-04-2023 par , , et

Le monde politique avait promis une revalorisation du secteur. Trois ans plus tard, qu’en est-il sur le terrain ?

Se voyaient-elles comme des héroïnes ? Il y a bientôt trois ans, la Belgique et le monde entier ont été confinés. Cette ambiance inédite aux airs de fin du monde sonne, aujourd’hui, comme un mauvais souvenir. Chaque soir, à 20 heures, des applaudissements brisaient le silence de la capitale pour remercier chaleureusement les soignants.

Les infirmières* apparaissaient comme les piliers de notre système de santé. Du Roi à l’ex-Première ministre Sophie Wilmès (Mouvement réformateur), la période Covid fut le théâtre de nombreux éloges et remerciements. Alda Dalla Valle, infirmière à Ath et vice-présidente de la Fédération Nationale des Infirmières de Belgique, s’en souvient bien : « Nous avons eu le terme essentiel. Joli terme n’est-ce pas ? Nous avons même eu les larmes de certains ministres », assure-t-elle.

Ont-elles reçu leur « médaille » ? Se sentent-elle revalorisées ? Quel avenir pour ce métier ? C’est ce que l’on a essayé de creuser.

 

* La profession des infirmières est occupée à 85,4% par des femmes (StatBel, 2020). Nous avons donc pris le pas de féminiser le terme d’infirmier, cela ne relève d’aucune volonté de féminiser le métier mais plutôt de refléter un état de fait.

Chapitre 1 : une profession sous pression
En 2018, le SPF Santé comptabilisait 215.000 infirmières qualifiées. Parmi elles, seules 59% travaillaient dans le secteur. © Silena Bosco

Treize heures, l’heure du dîner au Centre hospitalier universitaire Ambroise Paré de Mons. Les infirmières du service de chirurgie/urologie se réunissent dans une petite salle de repos. Sur la table, les sandwiches et tupperwares remplacent en quelques minutes le matériel médical. Attablée, elles en profitent pour rire et souffler. Pourtant, l’heure de la pause n’a pas encore sonné, elles doivent encore se répartir les tâches de l’après-midi. On sort alors les feuilles et stabilos, on range les fourchettes et les couteaux. On reprend son sérieux. Pendant leur break, les soignantes discutent des dossiers des patients pour ne pas perdre de temps. La pause se transforme en réunion de travail mais personne n’y trouve rien à redire. Au fond, ce n’est pas nouveau. Un bip résonne, et déjà il faut y retourner. Le sandwich est à peine avalé que le marathon commence.

 

Plus de six infirmières sur dix risquent l’épuisement professionnel en raison de la pandémie de COVID-19 selon une enquête de Pierre Smith et Arnaud Bruyneel. © Silena Bosco

 

 

 

 

 

 

Les patients sont conciliants avec nous, ils nous voient courir partout. Ils ne veulent pas nous déranger alors ils retiennent leurs douleurs un peu plus longtemps.

Sephora Chakir, jeune infirmière à Ambroise Paré

 

 

 

 

 

 

Il faudrait 20.000 infirmières de plus en Belgique. Le pays ne manquerait, a priori, pourtant pas de diplômées. En 2018, le SPF Santé comptabilisait 215.000 infirmières qualifiées. Parmi elles, 59% travaillent dans le secteur (« 10 % sont actives en dehors du domaine des soins de santé, 15 % sont inactives sur le territoire belge et 15 % sont déjà retraitées », précise l’étude). Cette pénurie, l’hôpital de Mons la connaît bien. En fin d’année dernière, le service de chirurgie/urologie a dû fermer ses portes deux semaines pour cette raison.

« Soigner, s’occuper de l’autre est devenu ingrat »

De nombreuses soignantes ont quitté leur profession, c’est le cas de Margot*. Cette infirmière de 40 ans a travaillé la moitié de sa vie à la Résidence Porte de Hal à Bruxelles. Aujourd’hui, elle s’est reconvertie dans un travail administratif à l’hôpital Delta. Margot a un fils malade et en tant qu’infirmière, elle pensait pouvoir aider et changer les choses. Cependant, les promesses non-tenues, selon elle, des politiques l’ont dégoûtée : «J’ai été déçue, les politiques, pendant la COVID, ont fait énormément de promesses. Mais il n’y a pas eu d’augmentation d’effectifs. On a soufflé pendant six mois, grâce à une vague d’arrivées. Aujourd’hui, on est épuisées et aucun jeune ne veut venir travailler dans ce secteur », déplore-t-elle. 

Pendant la période Covid, «j’ai eu des traumatismes au poignet et au dos, j’étais blasée. Ces blessures ne sont pas soignées. On ne prend pas le temps avec les gens. On avait sept minutes pour faire la toilette d’un patient, c’est expéditif, mais il fallait faire des « économies ». Soigner, s’occuper de l’autre, est devenu ingrat», détaille Margot. 

À l’hôpital Ambroise Paré de Mons, les CDD ne sont plus reconduits, les départs en retraite ne sont plus systématiquement remplacés et le recours aux infirmières intérimaires n’est plus d’actualité par manque de fonds. 

*Prénom d’emprunt

En France, la prime Covid était plus élevée qu’en Belgique. Les soignantes pouvaient recevoir jusqu’à 1.500 euros nets dans les départements les plus touchés. © Silena Bosco

 

 

De héros à zéro

 

Les infirmières, comme le reste du personnel soignant, n’ont pas compté leurs heures pendant et après la crise COVID, jusqu’à douze heures par jour. Il n’y a pas si longtemps, à l’hôpital Ambroise Paré, il y avait «une infirmière de nuit pour 34 lits», témoigne Élodie Mateo, infirmière de l’hôpital. «Ils nous ont tous oubliés, personne ne s’est battu pour nous et nos droits», regrette Margot. Les primes COVID n’ont pas été à la hauteur des efforts des soignants selon eux : «On nous avait annoncé 2.000 euros mais lorsqu’on l’a reçus ce n’était pas en net mais en brut. Ça fait un tout petit treizième mois», explique Emélia Lambrechts, assistante logistique au sein du service. Pour Margot, la prime COVID s’élevait à 700 euros, toujours en brut. En net, cela représente 250 euros payés en chèques-repas. «Par rapport à la France, nous au niveau rémunération, on n’a pas vu la différence. Oui, il y a eu une petite prime et encore», regrette Élodie.

 

 

 

 

Contactés plusieurs fois, l’hôpital Ambroise Paré n’a pas réagi, ni le ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit).

Chapitre 2 : une formation en question
Officiellement, remplir le dossier d'un patient est une obligation dont l'infirmière est responsable. © Silena Bosco

« Je me lève à 5h30 pour être sur mon lieu de stage à 6h20 mais il faut savoir qu’on commence à 6h45. Je compte toujours du temps pour trouver une place de parking et m’habiller ». Les journées de stage de Clara*, étudiante en troisième année en soins infirmiers, s’enchaînent et se ressemblent. « À partir de 7 heures, on fait la remise de service donc on fait le point sur les évènements de la nuit. Après ça, je dois suivre une infirmière pour faire les tournées des médicaments. Quand j’ai fini, j’aide les aides-soignantes à faire les toilettes des patients » mentionne-t-elle. Sur son lieu de stage, l’ambiance est bonne. «Je suis bien encadrée par le personnel et mes professeurs, et ça c’est super important. » Pourtant, le soir chez elle quand la pression redescend, l’ambiance est complètement différente. « Je ressens énormément de stress : j’ai une boule au ventre avant d’aller à mon stage, je pleure tous les soirs, je ne dors plus la nuit », dit-elle d’une voix tremblante. 

* Prénom d’emprunt

Je ressens énormément de stress : j’ai une boule au ventre avant d’aller à mon stage, je pleure tous les soirs, je ne dors plus la nuit.

Clara, étudiante en troisième année en soins infirmiers

 

En réalité, les stages peuvent représenter une période compliquée qui demande une grande préparation. Le terrain commence toujours par une révision complète de la matière vue en classe. Un travail conséquent. Toutefois, cette étape reste indispensable pour Florentina Bardio, professeure au Nursing de Mons : « On sait qu’on leur demande beaucoup, mais il faut comprendre qu’elles vont prendre en charge la vie de personnes entre leurs mains. Elles ne peuvent pas se permettre de commettre d’erreurs. » 

Le climat au sein de l’hôpital ne serait pas toujours optimal selon Clara. « Chaque année, il y a des stagiaires qui sont persécutés par quelques membres du personnel parce qu’on est « gauche » ou parce qu’ils nous voient comme des « sous-merdes ».»

Le secteur fait lui aussi face à une pénurie de personnel et est déjà débordé. «Les étudiants sont utilisés comme renforts pour soulager les soignants. Ils sont de la main-d’œuvre gratuite», explique Florentina Bardio. Un soulagement pour certains et un cauchemar pour d’autres. « Certains ne prennent pas le temps de retenir notre prénom, on est leur larbin, il nous refile leur travail », proteste Clara.

La situation est d’autant plus compliquée en raison de la réforme de la formation en soins infirmiers. Depuis 2016, la durée des études a été allongée, passant de trois à quatre ans. Cela alourdirait l’organisation des écoles, comme l’explique Dan Lecocq, président de la Fédération Nationale des infirmières de Belgique dans une interview à La Libre : « On est passé de trois à quatre ans d’études, avec 33% d’heures supplémentaires à organiser, mais pas un seul prof en plus. Les tâches se multiplient, mais pas le personnel. »

Cette situation compliquerait, aussi, la tâche du personnel soignant. En effet, le manque de professeurs obligerait les soignants à davantage s’occuper de l’accompagnement des stagiaires.

Les étudiants sont utilisés comme renfort pour soulager les soignants. Ils sont de la main-d’œuvre gratuite.

Florentina Bardio, professeur au Nursing de Mons

Humiliation, mépris, moqueries font partie du quotidien de certains stagiaires. Une réalité dont les professeurs ont conscience, comme l’explique Florentina Bardio : « En général, les étudiantes vont supporter et ne vont pas se plaindre. Elles vont préférer mordre sur leur chique plutôt que de venir nous en parler ». Clara justifie ce silence : « On a peur des représailles et des répercussions. Cela reste entre nous parce qu’on a peur d’être viré ou qu’on nous retire nos stages. »

Selon l’article de La Libre publié en juin 2014, la commission de l’Enseignement supérieur du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a approuvé un projet de décret pour les études de soins infirmiers. L’objectif principal est de relever les exigences minimales en ce qui concerne la formation des infirmiers. Une demande faite sous la directive de l’Union européenne pour assurer une meilleure circulation d’infirmiers entre pays membres 

En pratique, ce décret a modifié différents éléments concernant l’organisation de la formation. Le principal changement concerne l’allongement du cursus en soins infirmiers. Frank Vandenbroucke, ministre des Affaires sociales et de la Santé publique fait le point sur les deux types de formations possibles en Belgique : «La formation de bachelier en haute école, qui dure quatre ans, et la formation de niveau secondaire (le brevet d’infirmier hospitalier) qui s’étale sur trois ans et demi en Fédération Wallonie-Bruxelles et sur trois ans en Flandre.»

Cet allongement entraîne une augmentation des heures de formation : «On passe de 4.600 heures, dont la moitié devront être des heures de pratique, soit 2.300 heures et un tiers obligatoire de formation théorique

D’après la Fédération des étudiants francophones, la réforme répond à plusieurs objectifs dont l’augmentation de la qualité de la formation et la suppression de la pénurie récurrente dans le secteur. 

«On a quatre ans pour faire notre formation, mais au final, on perd un an. Faut savoir qu’en première année bachelier, on a pas du tout de pratique», explique Clara. Durant sa première année de bachelier, elle n’a eu que des cours théoriques pour appréhender son choix. « Avec un cursus de trois ans, les étudiants sont directement dans le bain. Ici, tu dois attendre un an pour voir ce que tu vaux ou même voir en quoi consiste ton métier. »

Cet avis est d’ailleurs partagé par Florentina Bardio. « Dans le cas de l’enseignement secondaire, l’allongement n’est pas utile. Après trois ans, j’estime que mes élèves ont le bagage nécessaire pour se lancer. Être directement sur le terrain permet de voir si on supporte le sang ou encore les seringues. Les élèves ne perdent pas un an avant de savoir s’ils sont faits pour le métier. Ici, elles sont utilisées de manière bénévole, or elles pourraient être sur le terrain et rémunérées. »

La santé des soignantes serait également mise à rude épreuve. «Il y a 20 ans, je prenais à la légère le travail des infirmières. Aujourd’hui, plusieurs de mes anciennes collègues enchaînent les fractures de fatigue et prennent des médicaments qui leur ruinent la vie», confie Margot*. Les conditions et la charge de travail sont les causes directes de cette dégradation de la qualité de vie. Au début de leur carrière, les jeunes générations suivent le même chemin : «L’année passée, à seulement 20 ans, j’étais sous traitement pour calmer mon anxiété et dormir correctement», explique Clara. 

Le métier peine à recruter. Selon Le Soir, l’Académie de recherche et d’enseignement enregistre 2.757 inscriptions en bachelier en soins infirmiers pour l’année académique 2018-2019 contre 3.448 inscriptions en 2015. Une baisse significative d’environ 20%. Le secteur semble vieillissant. En effet, en 2020, la moyenne d’âge des infirmières était de 49 ans.

Prénom d’emprunt*

Chapitre 3 : le budget disséqué
35,2 milliards d’euros, c’est le budget consacré aux soins de santé. Un budget qui paraît énorme, mais qui reste toutefois insuffisant selon les nombreux témoignages. © Silena Bosco

35,2 milliards d’euros (selon le Parti socialiste), c’est le budget consacré aux soins de santé. Ces dépenses représentent environ 10% du PIB. Sur ces deux critères, la Belgique se situe au-dessus de la moyenne européenne.

Un budget qui paraît énorme. Il reste toutefois insuffisant selon les nombreux témoignages, et qui ne semble pas résoudre les différents problèmes inhérents au métier.

Chiffres de 2021, Conseil de l’UE.

Pour faire face à la population vieillissante et aux innovations médicales, la Belgique a mis en place ce qu’on appelle la “norme de croissance”. C’est une norme annuelle qui, en prenant en compte l’indexation, permet l’augmentation du budget de la santé chaque année pour assumer les dépenses supplémentaires. Selon Louise Lambert de la Mutualité chrétienne, les coupes ont commencé dès 2012 avec le gouvernement socialiste d’Elio Di Rupo. Or, en 2010, elle était à 4%. En 2015 avec le gouvernement de Charles Michel, elle a atteint 1,5%. Ces gouvernements mettent en place une politique d’austérité qui restera la norme jusqu’en 2019.

Depuis 2020, avec le gouvernement d’Alexander De Croo (Open VLD), la norme de croissance est, aujourd’hui, passée à 2,5%. Dès 2024, elle passera à 2%.

«Le fonds n’a pas été créé pour faire face à la crise Covid mais à la suite de la grogne dans le secteur qui était présente avant 2019.»

Alda Dalle Valle, vice-présidente de la FNIB

 

En 2019, avant la pandémie du coronavirus, le Fonds Blouses blanches a été créé pour résoudre divers problèmes, comme le manque de personnel. Ce groupe de travail a réussi à débloquer 67 millions d’euros. Alda Dalla Valle, infirmière à Ath et vice-présidente de la Fédération nationale des infirmières de Belgique, explique que le manque de personnel et le problème d’argent n’est pas une conséquence du Covid. «Le fonds n’a pas été créé pour faire face à la crise Covid mais à la suite de la grogne dans le secteur qui était présente avant 2019.»

En 2020, le gouvernement a débloqué environ 1,2 milliard d’euros pour les soins de santé: 400 millions d’euros au fonds, 600 millions pour augmenter les salaires et améliorer les conditions de travail et 200 millions pour les soins de santé mentale.

Pourtant, selon Alda Dalla Valle, cet argent n’est pas débloqué pour les réels besoins des infirmières. Selon elle, il ne prend pas en compte la pénibilité du travail et ne permet pas aux soignants d’avoir un salaire suffisant.

De son côté, Frank Vandenbroucke a débloqué 43 millions d’euros pour les infirmières spécialisées dans les soins intensifs. Une proposition qui, selon l’Union4u, syndicat des aides-soignantes et des infirmières, ne prend pas en considération leurs revendications. Le syndicat a fait le calcul. Pour 25.000 travailleuses et en y additionnant la prime annuelle de 2.500 euros, elles ne recevraient en plus que 58 euros nets par mois.

Chapitre 4: l’intérim hospitalier, phénomène grandissant
Selon l'étude Maha, reprise par Le Soir, les hôpitaux généraux ont dû faire appel à 75% d'intérim supplémentaire entre 2019 et 2021. © Silena Bosco

Face à la pandémie, les institutions hospitalières ont été obligées de trouver du renfort. La direction est allée chercher de la main-d’œuvre en agences d’intérim. L’hôpital fait appel à ces entreprises lorsqu’elle en a besoin et l’infirmière peut choisir entre les différents contrats qui lui sont proposés. Certaines infirmières proposent, aussi, directement leurs services en tant qu’indépendantes. La libéralisation du secteur s’amplifierait.

Une étude commandée par le SPF Santé recensait, en 2018, environ 150.000 infirmières actives sur le marché du travail. Parmi elles, 11% étaient indépendantes exclusives et 8% étaient indépendantes complémentaires. Ces nouveaux statuts permettent à de nombreuses praticiennes de se détacher du carcan institutionnel. Ne pas avoir de contrat leur permet de pouvoir choisir. De plus, beaucoup de professionnelles du secteur utilisent ce statut pour faire des heures supplémentaires si elles le désirent ou simplement pour pouvoir travailler dans plusieurs secteurs.

Après un voyage d’un an, Marie, jeune infirmière, a décidé de s’orienter vers l’intérim. © Silena Bosco

 

 

 

 

Je revenais tous les jours stressée en ayant l’impression d’avoir mal fait mon boulot.

Marie, jeune infirmière en intérim

 

Marie est fraîchement diplômée depuis quatre ans. Très vite, elle a décidé qu’elle ne travaillerait pas longtemps en hôpital. Pendant son master de santé publique, son expérience de six mois en gériatrie et le rythme effréné de l’institution l’ont refroidie. « En règle générale, tu cours un peu tout le temps. Je revenais tous les jours stressée en ayant l’impression d’avoir mal fait mon boulot. Je prends les choses à cœur et tu as tout le temps l’impression d’être dans une perspective de rentabilité», déplore-t-elle.

Après un voyage d’un an, elle a décidé de s’orienter vers l’intérim. Elle cherche des emplois de transition le temps de trouver un job dans une maison médicale, un endroit où elle pense pouvoir exercer sa profession comme elle l’entend. « La boîte d’intérim me propose plein de missions différentes. Ils ont des partenariats avec plein d’institutions. Moi je lui dis quand je suis dispo, elle me propose des contrats et moi je dis oui ou je dis non. » Au final, son entreprise lui a proposé un long contrat au Samu social.

 « En étant flexibles, elles peuvent gérer leur temps de travail, leurs journées de repos, choisir l’institution.

Alda Dalle Valle, vice-présidente de la FNIB

 

Des cheminements comme celui de Marie, il y en a de plus en plus. Pour plein de raisons différentes, les conditions de travail peuvent parfois ne plus convenir. Alda Dalla Valle le résume bien : « En étant flexibles, elles peuvent gérer leur temps de travail, leurs journées de repos, choisir l’institution. » Pourtant, cette solution ne semble pas idéale, selon la vice-présidente : « Les boîtes d’intérim commencent à connaître des difficultés car les institutions ne peuvent plus se permettent d’engager par ce biais. »

Les heures de travail sont plus onéreuses, car l’agence retient une partie du salaire. Les infirmières, de leur côté, gagnent autant que leurs homologues salariées. Comme l’assurait Arnaud Le Grelle, directeur de Federgon, la fédération des sociétés RH et d’intérim, au journal Le Soir : « La règle est au travail égal – salaire égal. » De plus, les aides ponctuelles connaissent moins les rouages de l’institution. Marie explique qu’elles sont souvent cantonnées aux mêmes besognes, encadrées par celles qui connaissent mieux le milieu.

Chapitre 5: stopper l'hémorragie
Dans la perspective des élections de 2024, la Fédération Nationale des Infirmières aimerait que soit reconnu la pénibilité du métier. © Silena Bosco

(Re)valoriser le métier. Faire revenir les infirmières. À la veille des élections 2024, c’est ce que réclame l’ensemble du secteur. En premier lieu, la Fédération Nationale des Infirmières de Belgique aimerait que soit reconnu la pénibilité. Cela permettrait d’avancer l’âge de la pension et de donner des primes à celles qui veulent travailler plus longtemps. «La pénibilité, c’est de reconnaître la lourdeur de notre travail. À 67 ans, c’est le patient qui doit pousser l’infirmière, c’est inimaginable», explique Alda Dalla Valle.

Selon les syndicats Union4U et la FNIB, La proposition avait été entendue et encouragée par le Ministre des Pensions de l’époque, Daniel Bacquelaine (MR), en juillet 2020 lors de questions à la Chambre. Depuis la nouvelle législature, le projet a disparu des radars. Pour un retour en 2024 ?

#covid #Hôpital #Infirmière

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