Elargissement de l’Union européenne : pourquoi les Balkans ?

Le 6 février, la Commission européenne a annoncé qu’elle relançait le processus d’élargissement de l’UE pour les pays des Balkans occidentaux. Quelles sont les enjeux de l’entrée de cette région ?

L’entrée des Balkans dans l’UE fait polémique. Certains Etats membres sont en conflit avec des pays des Balkans et s’opposeraient à leur adhésion (Grèce, Croatie..), d’autres se questionnent sur la nécessité d’un élargissement dans la situation actuelle. Malgré les réformes entamées par les Balkans, la corruption et la violence restent des problèmes de taille. Dans ce contexte, comment envisager une entrée d’ici 2025 ?

 

Ils se sont prononcés à ce sujet : qu’en est-il réellement?

Mme Mogherini, haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
Je ne voudrais pas que, dans cinq, dix ou vingt ans, on nous dise que nous avons trahi une région qui voulait vraiment entrer dans l’UE

Il est difficile de se prononcer avec certitude sur une donnée aussi relative que le désir d’adhérer à l’Union européenne. Cependant le Conseil de coopération régionale (CCR) a révélé les résultats d’un sondage à ce sujet.

Volonté d’adhérer à l’UE
Infogram

 

L’enthousiasme mitigé des habitants des Balkans peut se justifier par “la fatigue de l’élargissement”. En effet, rappelons que le processus d’adhésion à l’Union Européenne est long et compliqué. Les pays des Balkans en sont tous à des étapes différentes du processus.

Cependant il faut rappeler que le baromètre révèle aussi que de plus en plus de citoyens dénoncent la corruption dans leur pays. Dans cette perspective, il est important pour les citoyens d’avoir une instance comme la Commission européenne pour contrôler les affaires du pays et contraindre les dirigeants à agir avec transparence.

Zoltan Kovacs, porte parole du gouvernement hongrois.
Si on observe les Etats-Unis ou la Russie, ils ont tous une stratégie pour les Balkans, mais l’Union Européenne n’a aucune stratégie pour les Balkans… L’Union Européenne devrait être une force stabilisatrice dans cette région.

Cette relance a justement été présentée comme une “stratégie” par la Commission européenne. En donnant la date de 2025, l’UE envoie un message politique pour motiver les Balkans à poursuivre leurs réformes. Relancer le processus d’adhésion est également une façon de se défendre de la Russie qui tente de faire un naître un sentiment anti-européen dans cette région.

 

Les questions clés :

 

Pourquoi l’UE relance les Balkans sur la procédure d’adhésion ?

Le processus d’adhésion des pays des Balkans dans l’UE a commencé en 2003. Début février, le parlement européen a seulement remis le dossier de l’élargissement de l’UE sur la table. Parmi les six pays concernés, quatre d’entre eux ont déjà entamé le processus d’intégration à l’UE. Ce processus avait été mis en pause en 2014. Jean-Claude Juncker ne voulait pas agrandir l’UE pendant son mandat de Président de la Commission européenne.

Selon, Ramona Coman, directrice de l’Institut des études européennes, cette relance a l’allure d’un message politique envers les Balkans, surtout à l’approche des élections européennes de 2019. “L’Union veut motiver les Balkans à continuer leur processus de réforme, mais dans l’état actuel des choses ce projet n’est pas réalisable à l’horizon 2025”.

 

Comment expliquer le choix de l’UE de tendre la main aux Balkans et non à la Turquie ?

Le président Erdogan a exprimé sa colère de voir les Balkans relancés par l’UE, alors que la Turquie est laissée de côté. Pourtant les deux dossiers sont incomparables.

Ramona Coman rappelle que la Turquie est dans une dérive autoritaire depuis longtemps, ce qui n’est pas le cas des Balkans où la démocratie s’installe peu à peu. Les Balkans constituent un ensemble de taille moindre, plus facile à stabiliser que la Turquie. Cela s’explique aussi par le fait que ces pays sont les frontières de l’Europe.

 

Comment l’UE entend-elle gérer les conflits présents dans cette région ?

Actuellement, l’UE est divisée par les crises identitaires. C’est également le cas des pays des Balkans qui sont en désaccord sur la question des frontières.

Quand les négociations d’adhésion ont été lancées avec ces pays, une des conditions explicite était de résoudre les conflits territoriaux et ethniques.

En Croatie et en Serbie, cette condition a toujours été vue comme une intrusion dans la souveraineté de l’Etat. La Croatie pourrait s’opposer à l’entrée de la Serbie dans l’UE.
Le cas du Kosovo n’est pas encore discuté car l’Etat n’est pas reconnu par certains Etats membres. L’UE devrait donc dans un premier temps régler les conflits entre ses membres et les Balkans.

 

 

Zoé Vancoppenolle et Myriam Djebiri

 

Crédit photo : pixabay/you_littleswine 

Crédit schéma : Zoé Vancoppenolle