Donald Trump a imposé, le 1er mars dernier, des taxes sur les importations d’acier et d’aluminium aux États-Unis. Une décision qui contrarie l’Union européenne. Certains craignent qu’une surenchère ne crée une guerre commerciale aux conséquences imprévisibles.
Donald Trump s’est fixé pour mission d’éliminer les taxes douanières européennes sur l’acier et l’aluminium. Le 45ème président des Etats-Unis estime que ces dernières sont déloyales et pénalisent les fermiers et manufacturiers américains.
Secretary of Commerce Wilbur Ross will be speaking with representatives of the European Union about eliminating the large Tariffs and Barriers they use against the U.S.A. Not fair to our farmers and manufacturers.
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 12 mars 2018
« Le secrétaire du Commerce Wilbur Ross va s’entretenir avec les représentants de l’Union européenne pour éliminer les taxes qu’ils utilisent contre les USA. Pas équitable pour nos fermiers et manufacturiers. »
Des propos à modérer
En 2017, le plus gros importateur d’acier pour les USA était le Canada avec 5,6 millions de tonnes. On ne retrouve qu’un pays membre de l’Union européenne dans le top 10. Il s’agit de l’Allemagne, huitième, avec 1,3 million de tonnes.
En parallèle, le pays de l’Oncle Sam ne produit pas assez d’aluminium pour s’autosuffire. En 2016, la production américaine représentait 2,3 millions de tonnes pour une consommation annuelle de 4,8 millions de tonnes.
If the E.U. wants to further increase their already massive tariffs and barriers on U.S. companies doing business there, we will simply apply a Tax on their Cars which freely pour into the U.S. They make it impossible for our cars (and more) to sell there. Big trade imbalance!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 3 mars 2018
« Si l’UE veut augmenter ses frais déjà énormes sur les entreprises américaines, nous appliquerons une taxe sur leurs voitures qui arrivent gratuitement aux USA. Ils font en sorte que nos voitures soient impossible à vendre en Europe. Un gros déséquilibre commercial ! »
When a country Taxes our products coming in at, say, 50%, and we Tax the same product coming into our country at ZERO, not fair or smart. We will soon be starting RECIPROCAL TAXES so that we will charge the same thing as they charge us. $800 Billion Trade Deficit-have no choice!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 2 mars 2018
« Quand un pays taxe nos produits, on va dire à 50%, et que nous taxons les leurs à ZÉRO, ce n’est pas équitable ou intelligent. Nous allons rapidement développer des TAXES RÉCIPROQUES pour charger ce qu’ils nous chargent. 800 milliards de déficit commercial, pas le choix ! »
Les États-Unis dépendent donc des importations pour équilibrer la balance. L’UE est le coupable tout trouvé par la Maison Blanche pour passer à l’offensive. Le principal reproche étant l’écart entre les taxes des deux blocs.
Une différence pas si vertigineuse
La taxation sur les importations dans le secteur de l’industrie était, en 2010, de 1,7% pour les USA contre 2,3% pour l’UE.
Le 1er mars dernier, Mr. Trump a adopté une mesure sur les droits d’importation : 25% pour l’acier et 10% pour l’aluminium.
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Pourquoi fait-il cela ?
Il s’agit d’une promesse électorale qui vise à rompre avec des pratiques jugées contre les USA, mais aussi afin de protéger l’emploi. Pour arriver à ses fins, Donald Trump a utilisé la Section 232 du Trade Expansion Act de 1962, qui vise à déterminer les effets des importations sur la sécurité nationale. « Une décision déguisée » pour Cecilia Malmstöm, Commissaire européenne au Commerce.
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Que pourrait faire l’UE pour se défendre ?
L’Union européenne envisage trois mesures pour répondre aux Etats-Unis :
— Une plainte auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce.
— Une surtaxe sur les importations de certains produits américains : Harley Davidson, Levi’s, le bourbon ou encore le jus d’orange.
— Une sauvegarde sur les importations d’acier en Europe, afin d’empêcher des exportations massives des pays tiers vers l’UE.
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Comment ont réagi les dirigeants européens ?
Cette décision inattendue les a surpris. S’ils s’accordent pour expliquer qu’une telle situation serait dramatique pour l’industrie métallurgique — l’Europe exporte chaque année 5,3 millions de tonnes de produits pour l’industrie américaine — ils ne sont pas d’accord sur la stratégie à adopter.
Le ministre de l‘Economie français, Bruno Le Maire, est partisan de la diplomatie : « Une guerre commerciale entre l’Europe et les Etats-Unis ne ferait que des perdants. » D’autres envisagent de rendre coup pour coup.
Le ministre des Affaires Etrangères allemand, Sigmar Gabriel, a déclaré vendredi : « L’UE doit réagir de manière ferme aux taxes douanières punitives des Etats-Unis qui menacent des milliers d’emplois en Europe. » De même, Jean-Claude Juncker, le Président de la Commission européenne, a affirmé : « Ils vont apprendre à nous connaître. Nous aimerions avoir une relation raisonnable avec les Etats-Unis mais nous ne pouvons pas nous contenter de faire l’autruche. »
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Y’a-t-il déjà eu une situation similaire ?
OUI
En 2002, Georges W. Bush avait voulu « sauver » l’industrie métallurgique américaine en instaurant des mesures protectionnistes. Les pays européens avaient contre-attaqué en augmentant les droits de douane de plusieurs produits américains et en portant plainte auprès de l’OMC. Fin 2003, Mr. Bush avait finalement fait marche arrière.
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Comment la situation peut-elle évoluer ?
Economiquement
Selon Jack* (nom d’emprunt), cadre de l’OMC à Genève : « Les mesures protectionnistes ne sont pas bonnes. Des décisions similaires avaient été prises par Barack Obama pour défendre l’industrie du pneu, cela n’avait pas créé de bénéfices. » Le risque majeur est : « De provoquer une réaction en chaîne qui menacerai l’économie mondiale. »
Politiquement
La situation sera compliquée à désamorcer. Pour Maxime Obé, assistant parlementaire du député européen Franck Proust : « C’est l’inconnu, on ne sait pas comment négocier avec Donald Trump. »
Pour l’instant, l’UE n’a pas tranché entre la solution diplomatique ou le conflit. Pour Mr. Proust : « Il n’y a pas de bon compromis. Il faut faire attention à la surenchère. »
Photo : Pexels
Texte : Adrien Giraud & Nathan Barbabianca