Les dessinateurs de bande dessinée se font de plus en plus nombreux. Cependant, certains sortent du lot et arrivent à s’installer dans le monde de la bulle de manière très diverse. Portraits de deux d’entre eux.
L’image en bande dessiné n’est pas abstraite comme un alphabet composé de 27 lettres. Le dessin, c’est quelque chose de palpable.
Mathieu Burniat
Dessinateur et scénariste blege

JOSEPH FALZON a 32 ans. C’est en 2008 qu’il obtient son diplôme à l’école supérieure d’art de Saint-Luc (ESA) à Bruxelles. Depuis tout petit, Joseph dessine. Il qualifie son choix d’étude par un « caprice ». En effet, la bande dessiné l’a toujours passionné et représente un rêve de gosse. En 2010, il sort Jours de Cendre, sa première bande dessiné. En 2012, Joseph travaille sur un projet pour une entreprise. Il s’immerge pendant trois ans dans un chantier. Il a également travaillé dans La revue dessinée, un magazine racontant l’actualité en bande dessinée. En plus d’être un dessinateur acharné, Joseph donne des cours à Paris afin de donner un plus aux étudiants préparant leur rentrer dans les écoles d’art. « Quand j’étais à la place de ses étudiants en 2003 – 2005, la BD commençait à venir, à avoir une bonne image, à être reconnu mais c’était pas encore tout à fait ça. Aujourd’hui, la bande dessinée se démocratise, c’est accepté, ce n’est plus vu avec un regard un peu de dédain », explique Joseph.

La bande dessiné fonctionne par cycle selon lui. La question de nouvelle génération se pose. Aujourd’hui, il parle d’une génération qui aurait pas moins de 30 ans. Il est impossible pour lui de définir une “nouvelle génération”, « cela dépend de la vision que nous adoptons », explique Joseph. La bande dessinée numérique est venu enrichir ce neuvième art. En revanche, « la bande dessinée numérique se cherche encore », pour Joseph. Entre 2010 et 2013, il participe au projet Les Autres gens, une bande dessinée en ligne accessible par abonnement. Des centaines de dessinateurs se donnaient le crayon afin de réaliser chaque jour une planche suivant une histoire écrite par un scénariste. « C’était une manière d’aborder la bande dessinée de façon intéressante», explique Joseph, « ça faisait un peu “Bédénovéla” », ajoute-t-il en rigolant.
CEDRIC MANCHE a 41 ans. Il enseigne la bande dessiné à Saint-Luc depuis maintenant sept ans. C’est en 1999 qu’il obtient son diplôme à l’ERG. Au départ, il étudie la vidéo, le cinéma d’animation et le storyboard, mais très vite il s’oriente vers la bande dessinée. Tout en étant étudiant, il met sur pied SPON, une revue hebdomadaire. C’est pas moins de 47 numéros en l’espace de seulement un an. Cédric a toujours su qu’il serait dessinateur. « J’étais attiré par le raccord d’image », évoque-t-il. En l’an 2000, Cédric fonde la maison d’édition de bande dessinée L’employé du Moi avec plusieurs dessinateurs. Ils mettent en avant une bande dessinée plus indépendante, avec une certaine qualité narrative. L’Employé du Moi a crée Grand Papier, une plateforme accessible gratuitement en ligne. Les créations proviennent de dessinateurs de partout dans le monde. « L’objectif est de donner une idée assez globale de ce qu’est la bande dessinée contemporaine », explique Cédric. En plus de ça, le lecteur a la possibilité de laisser un commentaire. « Cet aspect peut être intéressant pour justement répondre aux attentes du public. Ca créé une interaction qu’un auteur de bande dessinée papier n’a pas », raconte Cédric.

Malgré l’arrivé du numérique, ce passionné de bande dessinée reste très attaché au papier. « J’ai l’impression que les gens font plus de l’image commenté que de la bande dessinée avec le numérique », décrit-il. L’expérience de la bande dessinée reste quelque chose de très intime, l’auteur est seule devant une histoire. En effet, « l’auteur n’impose pas le rythme de lecture. On est vraiment dans un raccord d’une personne, l’auteur est en communication avec nous », énumère Cédric. Cette notion de “bande dessinée contemporaine” est très importante pour lui. Même si celle-ci reste un peu floue, elle est plutôt bien ancrée dans l’histoire. « En bande dessinée, c’est pas parce que c’est contemporain que c’est bon. C’est pas parce que c’est actuel que c’est meilleur qu’une création des années 60 qui à la limite est plus expérimental pour son époque », raconte-t-il.