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Migrants : décodage d’un échec

Publié le 15-02-2018 par

En 2015, plus d’un million de personnes fuient la guerre et le danger présents dans leurs pays d’origines et cherchent une vie meilleure et la sécurité en Europe. William Lacy Swing directeur général de l’Organisation Internationale pour les migrations, parle d’un problème politique plus que migratoire:

Il ne s’agit pas d’une urgence migratoire, mais d’une urgence politique. Le nombre de migrants serait gérable si l’Union Européenne avait un plan général.” Le directeur de l’OIM affirme qu’il y aurait actuellement “1,5 millions de migrants en 2015 sur le territoire européen sur les  550 millions d’habitants que compte l’Union actuellement. Cela reviendrait à 1,5% de la population totale européenne.

Cependant, les chiffres officiels fournis par Eurostat  diffèrent. En 2015, l’Union européenne compte 508,2 millions d’habitants avec un flux de migrants de 2,64 millions soit 0,52% de la population totale. La répercussion sur la démographie européenne est donc relativement minime.

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Citation: Lacy Swing affirme également que « le ratio de personnes qui meurent par rapport aux personnes qui tentent la traversée est toujours le même. L’année dernière, 5 000 personnes sont mortes, l’année d’avant 3 600 personnes ont perdu la vie. Cette année, le chiffre atteint déjà les 1 000 personnes. C’est une tragédie. »

Selon le Refugees Operational Data portal, un outil mis en place par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés , 3.771  personnes ont perdu la vie en 2015, 5.096 en 2016 et 3.119 en 2017. Le ratio, loin d’être constant, ne cesse d’augmenter et passe de 0,3715% en 2015 à 1,8% en 2017. Les chiffres de Lacy Swing sont également erronés sur le nombre de morts comptabilisé en ce début d’année, selon le Refugees Operational Data portal, 382 personnes avaient perdu la vie en mer en date du 14 février, contre les 1000 disparus annoncé par Lacy Swing.

 

  • Les dispositifs européens : Qu’est-ce que le règlement Dublin ?

Un des fondements de la politique d’asile européenne se trouve dans “le règlement Dublin” de 2005. Il stipule qu’une demande d’asile doit être traitée uniquement dans le pays dans lequel le demandeur d’asile est arrivé. L’Italie et la Grèce, faisant office de portes d’entrée en Europe, ont été prises d’assaut par les vagues migratoires de ces dernières années. A cause de la procédure Dublin, les demandes d’asile ont submergées les deux pays et une solution a du être mise en place afin de les soulager.

 

  • Quelle solutions pour la Grèce et l’Italie ?

C’est donc par le plan de relocalisation des migrants de 2015 que l’Europe a tenté de résoudre la situation. Il prévoyait de répartir 160 000 migrants dans les Etats-membres. Au final, ce plan a en partie échoué. En effet, à ce jour, seulement 33 600 migrants sur les 98 255 ont bénéficié de la relocalisation, soit un peu plus de 33% de l’objectif..

“Il faut bien comprendre que l’Union Européenne c’est 28 états très divers qui doivent composer ensemble et dans le contexte de gestion de flux de populations, il y a inévitablement des inégalités, et parfois des dérives. Mais je pense sincèrement que l’UE a fait au mieux” déclare un cadre du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

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  • Quelles sont les raisons des “mauvais élèves” de l’Union Européenne en matière de relocalisation ?

L’Autriche et la Hongrie conservatrices : Les partis au pouvoir dans ces deux pays sont des groupes sécuritaires.

La République Tchèque justifie par un plan anti-terroriste : Le président tchèque, Milos Zeman s’est positionné contre l’accueil de réfugiés pour éviter des “attaques barbares”.

La Slovaquie et Chypre emploient l’argument religieux : Le gouvernement slovaque accepte quand à lui uniquement des chrétiens, sous prétexte que le pays ne dispose pas de mosquées pour ceux de confession musulmane. Chypre quant à elle se dit prête à accueillir 300 réfugiés mais préfèrerait qu’ils soient “chrétiens orthodoxe”.

La Bulgarie et une économie vacillante :  le  gouvernement Bulgare, dans une lignée nationalistes et xénophobes, déclare: “il faut d’abord s’occuper de « nos pauvres » et de nos problèmes plutôt que des étrangers.”

La Lettonie et l’Estonie déjà en conflit avec la communauté russophone :Beaucoup de gens se disent que, si nous n’avons pas réussi à intégrer ces Russes, les problèmes ne feront qu’augmenter avec de nouveaux migrants” , déclare un porte-parole du gouvernement estonien.

Ce tableau souligne bien les inégalités dans les politiques d’accueil des migrants en Union Européenne. Cela justifie en partie l’échec du plan de relocalisation et pose un défi de taille pour l’avenir dans la gestion des urgences humanitaires.

Décodage par : Quentin Damman, Jimmy Foucault et Alexia Peren

crédit photo : MSTYSLAV CHERNOV

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