Ce que les détracteurs du CETA ne disent pas

La signature du CETA a été conclue le 30 octobre dernier. Cet accord de libre-échange entre l’Union Européenne et le Canada a fait couler beaucoup d’encre, mais ses enjeux réels restent flous.

Après des péripéties, coups de théâtre et rebondissements en série, le CETA est enfin arrivé à son dénouement. Paul Magnette, Ministre-Président de la Wallonie, s’était érigé en porte-parole des opposants à l’accord, majoritairement des Wallons. Les négociations ont déchaîné les passions en Europe et de l’autre côté de l’Atlantique ; le CETA a monopolisé les conversations et le devant de la scène médiatique pendant plusieurs semaines. Mais force est de constater que ses implications et conséquences restent globalement méconnues. Faut-il vraiment s’en méfier, ou l’accueillir à bras ouverts ? Décryptage en 4 leçons.

Les arguments des opposants au CETA, pas toujours fondés :

1 – Quelles conséquences commerciales pour les entreprises ?

Marianne Dony, présidente de l’Institut d’études européennes de l’ULB, apporte à cette question compliquée des réponses multiples et nuancées : « On peut dire « globalement » que, comme dans tout accord de libre-échange, les entreprises tournées vers l’exportation vont avoir de nouvelles opportunités. » Les entrepreneurs belges pensent en effet que le CETA présente un certain avantage pour leurs bénéfices, avec la possibilité de voir leur marché se déployer jusqu’aux Etats-Unis.

En ce qui concerne les autres entreprises, elles risquent d’être confrontées à une concurrence plus importante. « Mais il faut relativiser les effets dans les deux sens car le Canada, avec ses 35 millions d’habitants  est un « petit poucet » par rapport à l’Union européenne et ses plus de 500 millions de citoyens. », affirme Marianne Dony. Quant aux particuliers, les changements seront limités; nos habitudes et modes de vie ne devraient pas changer.

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2 – La porte ouverte aux hormones et OGM ?

De nombreuses peurs concernaient l’arrivée sur le territoire européen de bœufs aux hormones ou autres poulets au chlore. Bien que la situation en Europe ne soit pas totalement claire, il existe bien plus de restrictions concernant les hormones dans l’élevage qu’au Canada. Mais comme l’assure la Commission Européenne, « les producteurs canadiens ne peuvent importer et vendre des produits dans l’UE que s’ils respectent pleinement la réglementation européenne en vigueur, sans aucune exception. » Affirmation confirmée par Marianne Dony : « Les normes européennes et canadiennes devront être respectées par les importateurs respectifs. » Hors de question donc de trouver dans nos assiettes belges de tels produits puisque la sécurité alimentaire n’est pas concernée par le CETA. De plus, les droits de douane qui seront supprimés ne touchent pas aux viandes rouges et au porc, pour celles exportées du Canada à l’UE. Ces produits canadiens sont donc toujours limités chez nous.

3 – Qu’en est-il du mécanisme d’arbitrage ?

De nombreuses critiques pointent le rôle des juges internationaux. Il ne s’agit pas de tribunaux mais d’arbitres privés, chargés de régler les conflits entre investisseurs et Etats. Ils ne seraient pourtant pas neutres. Ces « juges » seraient influencés par les investisseurs et iraient dans leur sens, au détriment des pays.

Or le nouveau CETA a prévu de créer un tribunal international constitué de juges censés être totalement indépendants et objectifs. Ils ne doivent avoir aucun intérêt à se prononcer en faveur de l’une ou l’autre partie. Tout comme les juges traditionnels. balance

4 – Qu’est-ce que la clause de sauvegarde et en quoi est-elle nécessaire ?

L’accord prévoit une augmentation du quota de produits qu’il est possible d’importer dans un marché sans frais de douane. Ce qu’il y avait à craindre, c’est un possible déséquilibre sur le marché que cela pourrait engendrer. Pour ce scénario, le CETA a prévu une clause de sauvegarde qu’il sera possible d’activer pour limiter les importations canadiennes.

La Wallonie, quant à elle, a réussi à obtenir une clause de sauvegarde pour les régions belges. En d’autres termes, si l’une d’elle sent qu’il y a un déséquilibre sur son marché, elle peut demander à l’UE d’activer cette clause. Les peurs concernant l’agriculture wallonne étaient donc assez démesurées.

Sonia Romero Ruiz et Chadaporn Phayakhuan