Analyse : la transition écologique du gouvernement Michel

Ce mardi, Charles Michel était l’invité Matin Première. Il y établissait l’état des lieux de sortie de son gouvernement. L’écologie était au centre de l’entretien : marches pour le climat, énergies renouvelables, green bonds et d’autres enjeux sur la transition écologie sont au menu. Analyse et décodage. 

Thomas Gadisseux, le journaliste, posait la question suivante : « Vous avez dit que ces manifestants [pour le climat, ndlr] n’ont pas compris l’action de mon gouvernement, il n’y a pas une forme d’arrogance ? »

Charles Michel : « Je n’ai absolument jamais dit ça. Mes propos étaient les suivants : “Nous devons plus expliquer ce qui a été fait et nous devons faire davantage encore.” »

Le mystère plane

Nous avons parcouru maintes archives de la presse écrite, radio et télévisuelle et aucune trace de ces propos énoncés par le journaliste de la RTBF n’y figure. Il semble donc vrai que le Premier ministre n’ait jamais réellement prononcé ces mots. La presse relate des propos similaires à ceux que Charles Michel énonce dans sa réponse.

« La Belgique est le deuxième pays en Europe qui a mobilisé pratiquement 5 milliards d’€ pour des Green Bonds, des investissements vertueux pour la transition énergétique. »

 

C’est vrai

Les green bonds dont parle le Premier ministre sont des obligations environnementales. Il s’agit d’emprunts qu’une entreprise, ou une entité légale, effectue pour financer la transition écologique. Au niveau mondial, la Chine et les États-Unis sont les premiers pays à investir dans ces obligations. Sur le sol européen, on retrouve bien la Belgique en deuxième place qui a effectivement investi cinq milliards d’euros, selon les rapports de l’Agence fédérale de la dette et de la Climate Bond Initiative. Ces cinq milliards d’euros seront réinvestis dans les transports publics, l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables dans le royaume.

Le Premier ministre dresse un portrait plutôt positif du point de vue environnemental et écologique. Mais quelles sont les actions menées par le gouvernement durant les 5 dernières années ? Décodage en matière de recyclage, d’énergies fossiles et d’éoliennes en mer du Nord.

  • Qu’en est-il du recyclage des emballages en Belgique ?

Ce mardi, Charles Michel déclarait sur Twitter que la Belgique pouvait se féliciter de faire partie des bons élèves européens en matière de recyclage d’emballages. Selon lui, le taux de recyclage d’emballages en Belgique s’élève à 87,3%. Le Premier ministre ne précise ni ses sources, ni le type d’emballage impliqué. En effet, il faut distinguer les emballages « classiques » (carton, aluminium, verre) des emballages en plastique. C’est là où le bât blesse pour le plat pays. Nous avons comparé les taux de recyclage des emballages classiques et ceux en plastique de certains pays européens sur la période 2014-2016. Bien que la Belgique réussit à se maintenir première place en taux de recyclage d’emballages classiques, elle perd rapidement sa place lorsqu’on observe le pourcentage de recyclage des emballages en plastique.

évolution recyclage
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Recyclage plastique
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  • Le gouvernement Michel s’est-il engagé à réduire la consommation d’énergies fossiles ?

Selon le dernier rapport de la WWF réalisé par Climact, la Belgique soutient les énergies fossiles en leur distribuant chaque année au moins 2,7 milliards d’euros d’avantages fiscaux. L’État belge fournit des aides allant jusqu’à 493€, mensuellement, pour tout foyer disposant d’une voiture de société. Face à cette somme, un ménage usager des transports en commun belges n’obtiendrait qu’une aide de 94€. Dans son entretien, le Premier ministre désire « ne pas appauvrir les citoyens belges du jour au lendemain » en imposant des taxes sur les usagers des véhicules de société au nom de la transition écologique. Cependant, il semblerait que les taxes soient imposées aux foyers qui se fournissent en énergies vertes, notamment via l’éolien offshore.

  • L’éolien offshore est-il réellement avantageux pour les citoyens ?

 

Eoliennes offshore
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Il est important de souligner que la Belgique se situe en troisième place en terme d’installation d’éoliennes offshore au niveau européen. Face à elle, l’Allemagne et le Royaume-Uni sont en tête. Dans son entretien, Charles Michel déclarait que le gouvernement avait bataillé pour mettre en place ces éoliennes en mer du Nord qui permettent aujourd’hui d’approvisionner un million de foyers belges en électricité. Ce qu’il énonce est vrai mais ces installations se répercutent financièrement chez les citoyens belges. Selon Damien Ernst, spécialiste de l’énergie à l’université de Liège, le parc éolien en mer du Nord est assez coûteux. Le spécialiste affirme que les Belges paient l’électricité 120€ par mégawatt/heure alors que le fédéral pourrait acheter cette électricité sur des « marchés de gros » à 40€ par mégawatt/heure. Il est assez difficile de définir la consommation moyenne annuelle d’un foyer. En effet, chaque ménage ne dispose pas des mêmes équipements (lave-vaisselle, machine à laver, chauffage électrique, etc.). Par exemple, selon les calculs d’Ores, le conditionnement d’air froid consomme 6000 watts par an (donc 0,0006 mégawatts). N’oublions pas de noter qu’en 2019, chaque foyer belge contribue à financer (à hauteur d’une trentaine d’euros par an) ce parc éolien offshore voué à s’agrandir d’ici 2020.

Le gouvernement Michel a tenté de progresser sur la question de la transition écologique. Cependant, le chemin est encore long avant que le pays soit apte à abandonner les énergies fossiles.

Crédits photo : Flickr/European Council