La Belgique traverse encore deux crises majeures :
- Le contre coup de la crise économique mondiale déclénchée par la crise des subprimes en décembre 2008
- Le contre coup du 13 novembre 2016 avec les attaques terroristes perpétrées en France par des terroristes de Daesh dont une partie résidaient en Belgique. Le bilan est lourd: 130 victimes et plusieurs centaines de bléssés. Cet attentat et le “lock down” qui s’ensuivera apporteront un sentiment de crise majeure. Pour remédier à cela, les premiers ministres français et belge se sont rencontrés le 1er février dernier pour clarifier la situation et arrêter ce qui fut ressenti comme un véritable “Belgium–Bashing”.
Une campagne de “reconstruction de l’image du pays” a été entrepris par le gouvernement de Charles Michel et cette initiative est mise en évidence, notamment par la presse nationale. “Le Vif” titre son numéro du 29 janvier 2016 : “Comment redorer notre image”. Deux phénomènes sont intimement liés et directement concernés par ce contexte de crise: l’art et le tourisme. La question que l’on se pose alors est “Comme attirer du tourisme culturel alors que nos musées sont laissés à l’abandon?”
Comment expliquer cette ambivalence ?
Bruxelles, la capitale belge, comporte +- 60 musées. A titre de comparaison, Paris en comporte +-135 et Londres plus de 240.
1. Les coupes budgétaires à répétition
Depuis octobre 2014, le gouvernement se doit de faire des économies drastiques. Dans ces conditions, l’un des premiers secteur touché est celui des arts et de la culture. L’ampleur des économies imposées au budget culturel fédéral est spectaculaire et menace, même, sa survie. Un vrai coup de bambou. On savait déjà, à lire la déclaration gouvernementale, que le ver était dans le fruit, mais à ce point… C’est toute la culture, restée fédérale, qui est touchée : La Monnaie, l’ONB, Bozar, ainsi que ceux qu’on appelle les établissements scientifiques fédéraux (ESF) : les grands musées, le museum des sciences naturelles, l’Irpa, la Bibliothèque royale, les Archives du royaume… qui vont subir des baisses de subsides entre 15 et 30%*, du jamais vu! Et intenable selon les intéressés.
* Chiffres RTL
2. Les limites de la politique belge
La politique belge montre les limites de l’absence de fixation de priorités, de la pauvreté des budgets, de l’éclatement des compétences et de la dilution de volonté commune. La Régie des Bâtiments, organisme qui s’occupe des bâtiments sous la propriété de l’Etat fédéral, est accusée par de nombreux politiques. En réponse à ses accusations, Yoan Vanderberght, responsable communication de la Régie des Bâtiments, nous explique qu’une étude de marché est en cours pour la rénovation totale des différents musées bruxellois. En attendant qu’un budget soit disponible, des réparations ponctuelles sont effectuées et ce travail continu est déjà chiffré à plus de 10 millions d’euros. De plus, les bâtiments comme ceux du Cinquentenaire sont des bâtiments historiques et classés. Il faut donc des permis pour effectuer les travaux et cela prend du temps. Enfin, il y a plus de 1100 complexes de bâtiments, soit plus de 7,3 millions de m2 qui sont propriétés de l’Etat fédéral. Entre la justice, la police et les bâtiments publics, il n’y a pas que les musées qui ont besoin d’entretien et apparemment ceux-ci ne sont pas en tête de liste des priorités. Des réunions entre les ministres et la direction des musées sont prévues dans les prochains jours afin de permettre de débloquer des budgets.
3. Le conflit communautaire belge: une fuite de responsabilité
En accusant la Régie des Bâtiments, c’est le gouvernement fédérale (N-VA) qui est accusé. Et c’est vrai qu’il serait tentant de désigner la N-VA qui profiterait de cet état des lieux pour dépecer les collections fédérales existantes et transférer ce qui prend l’eau, vers des terres régionales plus abritées. Mais on pourrait également accuser les Wallons qui multiplient leurs propres musées et qui ne sont pas les premiers à vouloir mettre la main au seau fédéralo-bruxellois : le musée « de proximité » est tellement plus rentable économiquement et électoralement.
Bruxelles, la capitale du pays où les deux communautés sont représentées, est victime de cette guerre sans fin entre les flamands et les wallons qui préfèrent se rejeter la faute plutôt que d’unir leurs forces.
4. Une mise en perspective mondiale dans le temps et dans l’espace
Si on prend une vue plus globale de l’art sur notre planète, on peut effectuer une mise en perspective. L’art, ça sert à quoi ? et pourquoi ? Pourquoi cette obsession occidentale des artistes dans la culture moderne ? D’ailleurs, est-ce seulement le phénomène de la culture moderne ? Une étude réalisé sur cinq mille ans, couvrant l’ensemble du monde (voir référence) met en avant des conclusions intéressantes :
Où se trouve le centre de gravité des peuples, depuis 3 000 avant JC ?
Une équipe de chercheurs du LIEPP (Sciences-Po) analyse une base de données regroupant 1,2 million de personnalités connues. Une des leçons : les entrepreneurs et les artistes ont été plus utiles à leur ville que les bureaucrates et les militaires.
5. L’art, défenseur des valeurs fondamentales d’une démocratie
Les Islamistes de Daesh ne s’y sont pas trompés : le terrorisme perpétrés contre des civils et contre des vestiges culturels tels que Palmyre équivaut à planter un pieu dans le cœur de la civilisation occidentale, une négation de ses valeurs culturelles. Les mots, les vies mais aussi les pierres parlent des générations passées aux générations futures. Certains semblent y être sourds. Par négligence aussi.
L’art permet de réaffirmer les valeurs indispensables à la construction d’une société juste, tells que l’ouverture à l’autre et la réflexion critique. En cette période de crise, investir dans la culture est un bon créneau.
Guillaume Esmenard et Cecile Justine Berecez