Ahmed Laaouej était l’invité de Matin Première mardi 12 février pour exprimer son soutien à la grève nationale du 13 février. Il a avancé de nombreux chiffres sur les subsides et les augmentations salariales pour justifier la grogne syndicale. Décryptage.
“Ce que les patrons ne veulent pas admettre, c’est que chaque année ils reçoivent 13 milliards de subsides salariaux.”
FAUX
Ce chiffre avancé par Ahmed Laaouej est largement surestimé. En réalité, selon le rapport 2019 sur les coûts salariaux du Conseil central de l’économie, les subsides accordés aux entreprises (pour la Recherche et Développement, le soutien à l’investissement ou pour des projets spécifiques) représentent 3,5 milliards d’euros précise Pauline Bertrand, attachée de presse de la Fédération des Entreprises de Belgique. Elles reçoivent également entre 2,5 et 3 milliards d’euros de “subsides fiscaux” pour faire diminuer les coûts salariaux.
Au total, ce serait donc 6 à 6,5 milliards d’euros accordées aux entreprises et non pas les 13 milliards évoqués par Ahmed Laaouej.
“Les travailleurs n’ont pas d’autre choix que de manifester leur ras-le-bol, on leur propose 0,8% d’augmentation salariale.”
À PRÉCISER
Le Conseil central de l’économie a fixé la marge salariale maximale au-delà de l’indexation à 0,8% pour 2019-2020. Elle est calculée selon la loi de promotion de l’emploi et de sauvegarde de la compétitivité de 1996. Elle a été révisé en 2017 et est définie tous les deux ans par un accord interprofessionnel. Mais pour Pierre-Frédéric Nyst, président de l’Union des classes moyennes (UCM), une marge de 1,1% serait possible. La FGTB, le syndicat socialiste, parle elle d’une marge maximale qui aurait dû être fixée à 1,8%, si l’ancien mode de calcul était encore en vigueur.
Pour aller plus loin : Quelle marge pour nos salaires : 0,8%, 1,1% ou 1,8% ?
Penchons-nous sur les termes et concepts sur l’augmentation des salaires, souvent entendus et contestés mais pas toujours précisés.
1. Qu’est-ce que la loi 1996 et pourquoi sa réforme de 2017 est-elle contestée ?
La loi de 1996 vise à contrôler de manière stricte l’évolution des salaires. Pour rappel, la nuit du 9 mars 2017, la Chambre avait approuvé sa réforme sur la compétitivité des entreprises.
Cette réforme est à nouveau au cœur des contestations. La FGTB ainsi que la CSC, syndicat chrétien, condamnent cette réforme et souhaite une nouvelle révision. Pour eux, elle sauvegarde la compétitivité des entreprises pour obtenir un même écart salarial entre la Belgique et ses voisins.
À lire aussi : Ska (CSC) et Vertenueil (FGTB): «On veut changer la loi et revenir à une négociation des salaires»
2. L’index est-il responsable de la diminution salariale ?
Les salaires augmentent automatiquement lorsque les prix augmentent, c’est le principe de l’index. Et inversement. Le tout repose sur l’indice santé qui représente l’évolution des prix du panier de la ménagère. Cet indice est obtenu par la soustraction de certains produits à savoir les produits nuisibles à la santé comme l’alcool ou le tabac. Si l’indice dépasse le seuil de 2% appelé indice-pivot alors les salaires sont indexés automatiquement de 2% également.
Le saut d’index neutralise les régimes sectoriels d’indexation des salaires. Cela concerne les travailleurs du secteur privé et public. Le but est notamment de garder une compétitivité avec les pays voisins
3. Le déficit budgétaire impactera t-il les salaires?
Pour rappel, lors de sa démission, le gouvernement Michel avait laissé derrière lui un déficit budgétaire. En cause, la diminution des impôts de l’an dernier. La dette belge s’élève alors à 7,7 milliards d’euros. La FGTB soutient qu’elle va impacter les ménages. Arda, économiste à la Blue Tower,, explique :”Le déficit belge ici est élevée et il risque de toucher l’indexation, les impôts et avec les salaires. Mais, la Belgique peut aussi demander des aides des pays voisins ainsi qu’au Fonds monétaire européen.”